[Epopée] Les Arystides

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Joris
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lun. 2 mars 2015 01:30

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Les Arystides



Préface:


Cette épopée versifiée, c’est l’histoire d’un apprentissage tragique. C’est une épopée décadente: la métrique y est ignorée, les rimes y sont triviales, les strophes y sont inégales, et le vocabulaire y est puant . Une épopée qui convient à la littérature de notre monde, pauvre, bâtarde. C’est une littérature équivoque, ambivalente, incertaine, à la fois prétentieuse et sûre d’elle. Une littérature qui parle du Continent parce qu’elle n’ose pas parler d’elle, mais qui parle d’elle quand elle raconte le Continent : elle est aussi hypocrite. Le chemin du héros, Arys, est un chemin intérieur avant d’être un chemin terrestre. Il est presque semblable à celui du héros de l’épopée “L’Albescent” d’Elisard l’Ancien, un moine de Iona en qui j’ai trouvé beaucoup d’inspiration, et qui n’appréciera pas une telle dégradation de son oeuvre. J’invite les lettrés de mon Archipel à concevoir ce mouvement, celui de la Décadence. Donnons nous enfin une identité culturelle. J’invite aussi mon lecteur à s’attaquer à cette fausse épopée, et à y trouver ce qu’il acceptera de trouver. Certains préféreront les péripéties de ce voyage, d’autres la reconnaissance de certains lieux, d’autres encore admireront la verve de certaines rimes, ou la bassesse du héros. Une chose est sûre : je suis son maître, et son esclave.

I

Je m’adresse à toi, Créateur en colère,
Je m’adresse à vous, géniteurs de misère,
Pour vous conter l’épopée du bel Arys,
Lui qui par delà les mers, venu des abysses
A visité le monde, et ce qu’on y espère,
Craignant la faim, le froid, et les mystères,
Voyant l’amour, la mort, et tous ses frères.
Depuis les montagnes, a tout contemplé,
Et parmi les rivières, a tout observé,
Aidant les amis, tuant les ennemis,
Retrouvant à la fin, tout ce qu’il avait fuit,
Déçu par le monde, et ceux qui le font,
Réjouit par la Foi, pas ceux qui la clament,
Assis à Roskilde et nourris par leurs dames.

Si votre souffle est trop heureux en ces temps,
Nul Homme ne saurait vous conseiller ce chant,
C’est Lui-Même, qui contemple son Déclin,
Qu’Arys découvre, au long de son chemin.


II



Aux premières lueurs, notre héros prit l’entame,
Quittant ses proches, animé par la flamme,
Visiblement inusable, à l’éclat reluisant,
Soufflée aussitôt, par quelques brigands,
Qui de ses provisions lui firent soulagement,
Déterminé, il reprend le chemin du Roment,
Épuisé comme sa monture geignarde,
Voilà qu’Arys rencontre quelques gardes.
Ceux-ci, sifflant son destrier, le font tomber,
Et lui, les défiant, ramasse son épée,
Mais les coquins sont nombreux,
Et le nombre entraîne les peureux,
Qui bientôt poussent à terre ce non docile,
Et oublient leurs arrières, imbéciles,
Là où arrive un fovos, le sol tremblant,
Sous ses immenses pieds écrasants,
Les vilains tombent, et s’égosillent,
Et Arys s’enfuit, héros de pacotille,
Il vient de découvrir, en ce monde véreux,
La bestialité primitive, de l’homme malheureux,
Et le voici relancé, sur ce chemin qui le mènera,
Vers cette belle ville, que l’on nomme Caroggia.

Déjà démuni, il se fie à son adage :
“Sur le chemin que je sillonne,
Chaque pas est un apprentissage”


III



Arys le Faible, s’égarant dans la ville de nuit,
Grimpe sans savoir, la Colline du Tribiani,
Attiré par une noble dame qui lui fait signe,
Notre héros s’accorde une pulsion indigne,
Aveuglé par cette femme noblement vêtue,
Il entre servilement dans la chambre, nu,
Et s’adonne aux plaisirs, offerts par ce joli corps,
Ne doutant point alors, qu’un mari l’attend dehors,
Pour refermer ce piège, et par la suite l’emmener,
À la Maison de Justice, où il pourra profiter
D’un jugement partial, et de son vit coupé,
Pour venger le noble qu’il aura trompé,
Insupportable que de vivre impuissant
Pour s’être attiré la foudre des puissants,
Ces Grands sont forts: ils ont de l’argent,
Sur le reste de la ville, ils se font les dents,
Notre héros s’enfonce plus bas, vers la Miellée,
Quartier convenable, pour cet Emasculé.
Pour les pauvres qui errent ici, nulle Justice,
Et un seul breuvage : le contenu d’une flaque de pisse.
Notre héros contemple le calvaire de ce monde,
La Justice, comme la ville, est totalement immonde.
Honteux il prend la mer, ainsi que sa plume,
Et vers l’Ouest se dirige, sentant déjà l’écume.

Encore démuni, il se fie à son adage :
“Sur le chemin que je sillonne,
Chaque pas est un apprentissage”


IV



La voile s’approche du fougueux Archipel,
Dont le lien à la mer semble charnel,
Ici vivent fermiers, et autres écumeurs,
Arys y trouve son compte, et son bonheur,
Mais Ocolide a cela de bien particulier,
Qu’aucune idée intelligente n’y est respectée,
Et notre héros, du reste, n’a pas d’armes,
Violentes, les Îles perdent tout leur charme,
Bientôt, la plume craque face à la hache,
Et sur sa feuille, plus que des taches,
Des écumeurs il devient la victime,
Et cette fois la crainte le pousse au crime,
Il noie un fripon, qui voulait son pain,
En pend un second, qui volait son grain,
Et laisse le troisième brûler le reste,
Notre héros ne peut que lâcher du lest,
Il contemple ce bas monde de débauche,
Ne tente même pas d’en faire une ébauche,
Et sur ce ton, que l’on nommera amer,
Il reprend sa route, voguant sur la mer,
Au Nord, la fortune lui semble propice,
Sans le savoir, il retombera dans le vice,

De nouveau démuni, il se fie à son adage :
“Sur le chemin que je sillonne,
Chaque pas est un apprentissage”


V



Le voici débarquant, sur une nouvelle Île,
Qui comme l’autre, apparaît très hostile,
Celle-ci fait aussi des veuves, et en fera,
Car elle est aussi immortelle, la Belle Iona,
Mais Arys y découvre un autre peuple,
Nouvel exemple, au cours de son périple,
De la crasse qu’arbore l’Humanité,
Ici, notre héros rencontre un mal freloqué,
Vieux et sinistre, mais agréable et loquace,
Pour trouver de l’or, ce gredin est efficace,
Pourtant, Arys n’y trouve que des ennuis,
Il amasse fortune, en profitant de la nuit,
Et connaît la richesse la plus éphémère,
Car ses nouveaux camarades, avides,
Dévoués fièrement à ce vieux cupide,
Trahissent, et dépouillent le jeune Hura,
Qui a perdu de l’or, et tout son fatras,
Nouvelle leçon pratique, élémentaire,
Que notre héros retient, il n’est pas fier,
Les jours passent, sa fortune diminue,
Le temps fait son oeuvre, sa faim est accrue,
Et la Belle n’a rien d’autre à lui offrir,
Il n’a plus rien pour manger, ni sourire,
Et part vers une autre ville vénale,
Celle-ci est plus grande : la Capitale.


Dépouillé, notre héros se fie à son adage :
“Sur le chemin que je sillonne,
Chaque pas est un apprentissage”


VI



Voici l’instant du grand débarquement,
Sur cette terre où le monde ment,
Dans cette ville atteinte de tous les maux,
Là où les bourses se moquent des mots,
Le Sans-Descendance, seul dans ce dédale,
Ne trouve pas son chemin, en cet endroit trivial,
A gauche, un quartier aux couleurs de Caroggia,
Mais à droite, un autre, fidèle aux traditions Hura,
Arys s’y invite, croyant y trouver la paix,
Celle de son enfance, qui lui conviendrait,
Rien n’y fait : ici aussi, le monde est corrompu,
Nuls paysans, nuls chevaliers reconnus,
Uniquement des élites, fières et infectes,
Arys n’y reconnaît que des insectes,
La Foi y est une élégante tenue,
Qu’on porte souvent, pour être bien vu,
Et qu’on renie parfois dans les actes :
Arbitrio ne regarde pas ce monde abjecte,
Où le pain ne se partage pas mais se vend,
Comme l’amour, et tout ce qu’on défend,
C’est le riche, le fort, et le sournois,
Un monde avide, qui n’en fait qu’à sa joie,
Et que notre héros ne reconnaît pas :
Mensonge et vertu, s’y mêlent avec fracas.
Il est perdu une nouvelle fois, trompé,
Avant même d’avoir été dépouillé,
Arys quitte aussitôt cet endroit infâme,
Nulle envie d’y laisser son âme,
Il part vers l’Est, longeant l’Ausère,
Mais sa route sera encore éphémère.

Vidé d’Espoir, notre héros se fie à son adage :
“Sur le chemin que je sillonne,
Chaque pas est un apprentissage”


VII



A peine parti de la cité Sublime,
Arys retrouve sa condition de victime,
Son chemin est encore interrompu,
Par des Vaavhas menaçants et issus,
Du Nord dont ils ont perdus traces,
Pendant la guerre perdue par leur race.
Ils pillent notre héros, affamés et véloces,
Ces animaux sont furieux et atroces,
Et Arys fuit, couard mais aussi sage,
Laissant là cette troupe sauvage,
Qui par la Garde se fera châtiée,
Après que cent veuves aient finies violées,
Mais cela ne concerne pas notre héros,
Il n’ira pas au Nord, il en sait déjà trop,
Et s’éloigne vers l’Est, et les Monts Adaars,
Dernier refuge d’Espoir : la Noble Golvandaar.

Plein d’illusions, notre héros se fie à son adage :
“Sur le chemin que je sillonne,
Chaque pas est un apprentissage”


VIII



Arys le Sans-Vit, fatigué d’un trajet si long,
Et sage par son absence de pulsions,
Arrive dans la Grande et Glaciale,
Cette ville abrupte et non bestiale,
Où les pauvres deviennent riches,
Où l’on entend souvent sonner les cloches,
Qui réunissent le monde sous la Foi,
Et rappellent celui d’autrefois.
Arys se rend donc à la prière,
Mais les regards trahissent les manières :
Notre héros ici n’est qu’un étranger,
Il est bien éloigné de la Vérité,
Dans la salle, sa place est au fond,
Avec les chiens, et les bas-fonds,
Là où la Foi s’écoute uniquement,
Mais ne se pense que par entendement,
On lui dit que la richesse est saine,
Qu’elle mène à une piété certaine,
Et malheureux celui qui n’aide point sa famille.
Un discours par des aisés, qui brillent,
Et pour des miséreux, qui triment:
L’hypocrisie sermonne depuis les cimes.
Du haut de ces Monts, la Foi ne peut voir,
Qu’à ses pieds, le peuple veut boire,
Mais n’a pas soif de belles paroles.
Les moines demandent quelques oboles,
Arys a peu d’argent, et ne peut faire don,
Mais dès qu’il sort, on crache son nom,
Et Golvandaar devient une autre Caroggia,
Arys, comme ses pairs, la méprisera,
On refuse de lui vendre de quoi manger,
Ou même de lui donner un métier,
Alors notre héros quitte la ville,
Il s’aventure dans les Monts : infertile.

Désormais éclairé, Arys peut comprendre :
“Le monde que j’ai contemplé,
N’a qu’une envie : se pendre”


IX



Notre héros, est las d’être lesté,
Ce petit pauvre ne veut plus marcher,
La neige, le froid, le vent glacial,
Nul ne veut de lui en ce monde bestial,
Mais par chance il trouve une grotte,
Ici, des couloirs, et même une porte,
Cave sombre, et déjà arpentée,
Arys y entre, et y voit une opportunité,
Entre deux tombeaux : elle est cachée,
Il se saisit de ce Cor splendide,
En ce lieu à l’odeur fratricide.
Entendez vous le souffle de ce Cor,
Dont la musique fait mon corps,
Symphonie des mots et de leurs sons,
Formée par les lettres et les passions,
Chantée par Ma plume et Mon encre,
Cette harmonie peut convaincre :
Serait-ce le fruit de ma Création?


X



Alors, me direz vous : Qu’est ce bel instrument ?
Voici ma réponse : l’Arme de Justice.
Celle de l’Equilibre, celle de l’Hubris,
Que notre héros pourrait saisir ardemment.

Il peut souffler dans ce Cor du dernier Espoir,
Trouvé en ce maudit lieu des plus infâmes,
Et donner le salut à toutes nos âmes,
Celui que nous désirons tous sans le savoir.

Mais Arys est libre, et le laisse caché,
Préférant l’Ouest, il reprend sa longue route,
Traversant l’Océan, il comprend sa mission.

Il part au loin, vers ce monde inviolé,
Pur, vierge et inaltéré, sans aucun doute,
A Esperia, il trouvera sa volition.



Quant à moi, l’art me suffit,
Impuissante que cette poésie,
Comme le reste, elle est pourrie,
A l’image d’un âpre et mauvais fruit.
Voyez cette fin, et ce berceau,
Celui d’Arys renaissant, tel un héros,
En vérité, pauvre est son écho :
Notre ami n’a jamais quitté ce tombeau.




Par Joris Tenkor, Abbus Emérite et Aumonier d'Esperia.
"Et cette rose sans pétales, qui tombe froide sur la dalle."

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