L'Homme au Heaume d'Or, Tome 6 :
Hors RolePlay :
[Livre][Page de moyenne qualité, couverture bleue nuit et épaisse, supporte plutôt bien les voyages. Format : 28x20cm]
[Écriture droite et appliquée]
Chapitre 9 : Un retour inattendu
Bien alourdis par son équipement, l'Homme au Heaume d'Or ne parvenait plus à courir. Il était déjà parvenu à une issue de la place, mais les mercenaires étaient à ses trousses. La garde était en train de se réorganiser, certains pourchassaient déjà les auteurs, visiblement plusieurs, de ce désastre.
Tandis que le Chevalier déchu se pressait dans les ruelles, il entendait les soldats crier et se rapprocher dangereusement de sa position. Arrivé aux quais par pur hasard, un homme l'interpella :
- Le Heaume d'Or ! Par ici !
Il s'approcha de l'inconnu en armure de cuir clouté, jetant un coup d'oeil aux ruelles derrière lui.
- Tu es bien Espérien toi ?
- Heu... Oui, pourqu...
- Tu sais comment retourner dans le Nouveau Monde ? Le coupa-t-il.
- Je supp...
- Peu importe, ne trainons pas. Tu répondras à mes questions pendant le trajet.
- Si v...
- Monte dans le navire !
L'Homme au Heaume d'Or obéit sans poser plus de questions, lui aussi assez pressé de quitter cet endroit. C'était une embarcation munie d'un seul mât, assez petite, disposant d'un grand-voile simple. Ils quittèrent le port assez rapidement.
Le vent soufflait fort, en poupe. L'Espérien s'était déjà installé pour attendre sagement, aiguisant son épée tout en lisant le Code, Thème "Respect". L'autre finit par s'assoir à côté de lui après quelques minutes.
- C'est quoi ça ?
- Le Code, vous devriez le lire ça vous servirait beau...
- Nan laisse tomber je m'en fous en fait. Tu sais comment aller au Nouveau Monde ?
- Gwylonna, une marchande d'esclaves, y va assez souvent. A part ça, je ne vois pas.
- Mmfh... Pas grave, ton petit bienfaiteur te trouvera bien. Il t'emmènera en Esperia lui.
L'Homme au Heaume d'Or fronça les sourcils, réfléchissant à ces mots. Il est vrai que tout ce qui lui était arrivé ne pouvait être une coïncidence, surtout l'intervention pendant l'exécution. Il y avait forcément quelqu'un qui veillait sur lui, et heureusement, sinon il serait actuellement mort.
- Pourquoi vous tenez tant à ce que j'aille au Nouveau Monde ? Interrogea-t-il son interlocuteur, finalement.
- Parce que je dois y aller moi aussi.
- Je peux savoir pourquoi ?
- Nan.
Il n'insista pas. Il avait une dette envers cet homme, aussi rustre soit-il. Quelques heures passèrent sans autre interruption et Caroggia fut bientôt en vue. Pendant que l'inconnu procédait à la manœuvre pour accoster, L'Homme au Heaume d'Or sortit l'armure ornée de son passé du caisson. Il l'examina un moment, repensant à ses missions et à son ancien seigneur. Puis il se changea, pour mieux passer inaperçu dans une ville où il était déjà passé. L'homme au heaume d'or était bien trop connu à présent pour se balader en tenue Espérienne. Il descendit enfin sur les quais. L'agitation était à son comble, le marché était en pleine après-midi de commerce. Les gens s'affairaient pour remplir les navires de marchandises ou pour débarquer le matériel qui servait aux étales.
- On se retrouvera ici quand tu auras pris contact avec celui qui nous fournira notre moyen de retour.
Le Chevalier déchu hocha la tête et partit sans un mot : la compagnie de cet homme était insupportable.
Il se promena un peu partout dans la ville en demandant à quelques passants s'ils savaient où se trouvait la maison Esperanza. Le soir venu, personne ne lui avait donné la moindre information sur cette famille. Tout le monde en niait l'existence. Il s'arrêta à une taverne pour dîner. Elle était assez bondée, mais il restait quelques tables de libre. La plupart des consommateurs étaient des marchands, le reste se composait surtout de mercenaires. Il y avait peu d'étrangers. Le soldat Espérien jeta un œil au menu : du poisson, du poisson, de l'hydromiel et encore du poisson.
- Booon... Au moins le choix n'est pas difficile. Tavernier ?
Un serveur s'approcha.
- Vous désirez ?
- De l'eau et du poisson.
- Lequel messire ?
- N'importe, je fais pas vraiment la différence.
L'homme réfléchit un petit moment, se rappelant alors qu'un client était partit en entamant à peine sa morue il y avait une heure.
- Hum... Oui messire, votre morue arrive de suite.
- Merci.
Il s'éloigna pendant que L'Homme au Heaume d'Or ouvrait à nouveau le Code, Thème "Interdictions". L'attente ne fut pas bien longue, et l'ancien chevalier en armure ornée d'argent dut ranger son ouvrage peu de temps après. Il n'avait jamais vraiment aimé le poisson. Mais il avait faim. Il décrocha son heaume à visière étroite et commença à manger. L'endroit se remplit encore plus, et bientôt un voyageur n'eut d'autre choix que de s'installer devant lui pour son dîner.
- Bonsoir messer, lui dit-il pendant qu'il s'asseyait.
- Bonsoir.
De toute évidence, l'inconnu n'était pas à l'aise devant un homme assez surarmé pour ne pas pouvoir se déplacer en courant. Il se remit à manger tandis que l'autre passait sa commande. Bientôt, une bataille d'ivrognes éclata entre deux mercenaires. Ils renversèrent quelques tables et s'approchèrent dangereusement de celle du Chevalier déchu, qui ne tarda pas se lever. Il planta sa dague brutalement sur le support en bois. Les deux combattants s'arrêtèrent, regardant le type en armure.
- T'as un problème ?
- Oui, j'essaie d'apprécier mon repas.
- Bah apprécie-le en silence.
- C'est à vous de faire silence messers. Je crois que votre pitoyable affrontement gêne les clients de cet établissement.
- Petit effronté !
Ils s'approchèrent. Un d'entre eux tenta de lui mettre une droite dans la tête. Il décrocha son heaume de guerre rapidement tout en esquivant en se baissant. Il plaça un bon coup de casque dans l'abdomen de son adversaire, puis un autre d'un revers dans la tête du deuxième qui s'apprêtait à lui donner un coup de boule, et revint au premier qui s'était penché en se tenant le ventre sous la douleur. Le Chevalier déchu lui asseina un ultime coup pour le faire tomber d'une bonne frappe à l'arrière du crâne.
Il se rassit calmement, désespéré par les effets de la boisson sur ces deux soldats qui cuvaient de leur surplus d'alcool par terre. Il termina assez rapidement son repas et remit à nouveau son heaume. Les gens n'étaient pas choqués de ce qui venait d'arriver. Apparemment les combats d'hommes saouls étaient fréquents. Avant de partir, il s'adressa à l'étranger.
- Par pur hasard, sauriez-vous quelque chose sur une famille dénommée "Esperanza" ?
La plupart des conversations s'arrêtèrent soudainement.
- Oui. Une ruine porte ce nom pas loin de la côte dans le quartier riche.
- Je vous remercie.
Les commerçants suivirent L'Homme au Heaume d'Or du regard tandis qu'il sortait de la taverne. Il ne mit pas longtemps à trouver le manoir en question. "Une ruine... C'est le mot", se dit-il à lui-même. La maison d'évidence abandonnée était à moitié effondrée. Il restait peu de choses du toit et de la demeure dans son ensemble. Il entreprit de faire le tour du domaine pour observer un peu. Le jardin donnait une vision imprenable sur la mer. Il n'avait jamais était véritablement attiré par celle-ci... Mais la vue était, il l'avouait, magnifique. Il s'installa par terre pour passer la nuit, gardant bien sûr son heaume sur la tête.
Son sommeil fut interrompu brutalement, il sortit sa dague et l'apposa sur la gorge du perturbateur qui semblait penché sur lui. Une voix féminine s'éleva.
- Retirez cette dague, je viens vous amener aux Esperanza.
La vision du soldat Espérien s'éclaircit. C'était une femme vêtue de noir, le visage masqué.
- Pourquoi vous ferais-je confiance ?
- Parce que c'est la seule piste que vous avez.
Il fronça les sourcils, rangea sa dague et se leva. La nuit régnait, il était certainement dans les alentours de minuit. L'homme traversait la ville avec l'inconnue, qui ne s'arrêta que devant une porte qui donnait sur une cour dans un quartier moyen. La lumière des torches l'éclaira et le Chevalier déchu dut s'efforcer de ne pas fixer les formes de la femme qui l'amenait dans la masure. Une gamine arriva de la bâtisse en courant.
- T'es qui toi ? dit-elle en ralentissant brusquement.
- Heu...
- C'est une Esperanza. Déclara simplement la femme à l'Espérien, puis elle tourna la tête vers la petite fille. Julia, cet homme a parcouru toute la ville pendant toute l’après-midi pour trouver ta famille. Venez, par ici.
Elle ouvrit une petite porte qui menait à une cave et descendit dans l'escalier. La pièce en sous-sol était assez grande, une table plutôt longue occupait la place du centre. La gamine prit un siège et la femme invita l'armure mobile à s'assoir. Il obéit, sur ses gardes.
- Je vous laisse discuter un peu... Je dois me changer.
L'inconnue portant le masque remonta par l'escalier et aussitôt la petite commença à poser des questions.
- Vous êtes qui monsieur ? Pourquoi vous me cherchez ?
Il hésita un peu, puis répondit d'un ton neutre :
"Je suis le protecteur,
Je suis l'entraîneur
Je suis le sans-nom,
Je suis le sans-abandon,
Je suis le meneur,
Je suis l'ambassadeur,
Je suis l’humble soldat,
Je suis le bras droit,
Je suis le défenseur
Et le porteur,
Non pas de la loi,
Mais de ma foi
Envers mes seigneurs
Et envers mon honneur,
Je suis le seul fidèle,
Car les inconnus ne seront présentés comme tel,
Car le Code est ce que je suis,
Et je suis ce que le Code est,
Car je suis Saint Chevalier,
Symbole de l'honneur et du respect.
Ainsi je dois me porter,
Et je le ferai à jamais."
Il y eut un long silence, puis la gamine reprit la parole :
- Et sinon vous êtes qui ?
- ...Le frère d'armes de Mata'.
- C'est un peu plus simple de répondre comme ça non ? Il va bien ? Il est toujours au Nouveau Monde ? Comment vous êtes arrivé là ? Pourquoi vous cherchez les Esperanza ?
- Hum... Du calme voyons...
- Je suis calme !
- Je n'en doute pas un instant...
- Pourquoi tu portes ton casque même à l'intérieur monsieur ?
- Parce que je me sens en sécurité avec.
- Tu es aussi fort que Mata' monsieur ?
- Ça... Ça reste encore à prouver. Il a un maniement de l'épée qui s'approche de l'excellence.
- Toi aussi ?
- C'est à mes adversaires de juger mes talents, pas à moi.
- Toi aussi tu es fort à l'épée ? répéta-t-elle.
- Hum... Je sais la manier aussi bien que Mata' je pense.
- Tu penses ?
- Oui je pense.
Il y eut un autre silence. L'Homme au Heaume d'Or reprit la parole cette fois.
- Pouvez-vous me parler du passé de Mata', Dame Julia ?
- C'est pas gentil de se moquer de moi. Dit-elle en croisant les bras.
- Je suis très sérieux.
Les yeux de la petite fille brillèrent, elle commença son récit avec difficulté.
- Il a jamais été d'accord avec ses maîtres à l'académie, toujours rebelle. Il était jamais sage. Après il a rencontré Eléa là-bas et il est tombé amoureux, ils étaient tout le temps ensemble, même au combat. Au bout d'un moment il a finis par accepter de rester sage et il a terminé l'école.
- Vous voulez dire qu'il a eut son diplôme juste en devenant plus calme ?
- Oui, il était trop fort. Après ça je sais pas trop ce qu'il faisait avec mon oncle. Mais au bout d'un moment en les écoutant j'ai su que la famille Exeniora avait arrêté de nous parler. En fait après j'ai compris que ces méchants faisaient tout pour nous tuer et que Mata' lui il faisait des trucs tout seul pour les éloigner. Et un jour il a dut affronter des mercenaires et il y en avait un qui était en fait Eléa, qu'il a tuée sans savoir que c'était elle parce qu'elle avait le visage caché. Il a même eu une grosse cicatrice dans le dos parce qu'il faisait plus assez attention et qu'il était détruit de voir ce qu'il avait fait. Il a massacré comme jamais celui qui l'avait frappé lâchement... Il était très triste et très en colère. Il est revenu à la maison presque mort et quand il était debout de nouveau et bah il parlait presque plus. Uniquement à moi en fait... Il est devenu Mata-Hamune par un rajout de nom, comme mon papa : Yolan-Hamune. Mata' il m'a dit que ça veut dire "le vaillant" dans un ancien dialecte Caroggian. Et après ils sont venus au manoir... Plein d'hommes armés, qui se sont battus avec nos gardes personnels et Mata'. Mon oncle a réussis à s'enfuir avec moi et il m'a déposé chez madame Vaea, je l'ai plus revu depuis et Mata' non plus mais on sait tous qu'il est à Esperia.
- Je vois...
L'Espérien était éprouvé par la gamine qui évoquait son passé. Ça avait dut être dur pour elle de vivre sans ses parents... Survivre à un massacre... Le pire c'était cette ville corrompue qui niait les meurtres et les crimes qui avaient lieu ici. Les gardes étaient certainement corrompus.
- Tu vois quoi ?
- Je vois pourquoi Mata' a ce caractère-là, je vois ce que je voulais voir en venant ici. Mais je n'aurais jamais pensé découvrir une famille brisée et oubliée.
La femme revenait, peu à peu apparut sa beauté stupéfiante tandis qu'elle descendait marche par marche. L'Homme au Heaume d'Or s'efforça de ne pas trop la fixer.
- Alors, que vouliez-vous aux Esperanza ?
- Je n'ai jamais rien voulu d'eux. Je voulais juste en apprendre plus sur eux. C'est chose faite désormais... Je me disais aussi que vous étiez un peu jeune pour être la mère de Julia.
- Vous devriez prendre du repos. Dit-elle en souriant pour éviter de répondre. Je vous offre le logis pour votre nuit.
- Je vous remercie Dame Vaea, mais je préfère vous prévenir que je partirai dès demain matin.
- Je comprends.
Elle lui tira un lit et remonta, lui laissant la cave pour dormir.