La vallée de l’horreur

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Cet écrit a été rédigé par Kaarlo et se trouve sur la nouvelle Esperia.

La vallée de l’horreur

La pluie tombait abondamment et la brume tapissait les environs lorsque je sorti de la cale du bateau esclavagiste, mon regard devait sans doute paraître vide pour ceux qui me regardaient de l'extérieur mais si cette expression de terreur se dessinait sur mon visage c’est parce que j’avais été confronté aux horreurs les plus indescriptible et inimaginable de notre monde. Cette terreur ne me quittera d'ailleurs jamais et me poursuivra à travers mes cauchemars. Cette île sur laquelle je débarquais, appelée Esperia, l’espoire. Peut être que celà me permettra d’oublier ce que j’ai vu et je l’espère m’éloignera au plus loin possible des monstruosités auxquelles j’ai été confronté et qui aurait rendu fou n’importe qui d’autre… D’ailleur peut être que je l’étais devenu moi aussi. J’étais originaire d’un petit hameau adjacent de Kraanvik en Edella. j'habitais le troisième chalet en partant de la route qui remontait depuis le ruisseau.

Mon père était un fort adaarion robuste , endurcis par les voyages en territoire vaahvas dans le Kinemaar. C’est là bas qu’il a rencontré ma mère , d’une tribu adaariophone. Je passe les détails mais le fait est que j’ai été élevé dans la tradition monachiste même si de temps en temps quelques bribes du culte des sept me parvenaient éveillant ma curiosité. Mes parents étaient considérés comme des liberains de par mon père. Celà m’a permis sans doute une ouverture d’esprit plus marquée et aussi le fait que je me souciais très peu de l’image que je renvoyais. Cependant je restais bien éduqué à un point même qu’après avoir servis comme apprentis dans une papeterie auprès de ma tante je rencontra un érudit qui venait acheter des livres et du matériel. Il proposa à mes parents de m’emmener à L’Oppikaupunki, la grande université de Golvandaar. Sans doute avait t il flairé mon potentiel en discutant avec moi alors que ma tante allait chercher la commande.

Mes parents n’étaient pas riches, cependant la famille a aidé financièrement et je partais pour Golvandaar , capital de l’érudition. Mon périple me fit traverser les montagnes et les vallées, celles que j’avais tant parcourues lorsque j’étais plus jeune encore. Seul. Des sommets allant tutoyer les cieux, s’élevant tels des pointes de flèches vers le ciel, remplissant celui-ci d'émerveillement et de gloire. J’aimais énormément grimper les plus hauts sommets autour de Kraanvik. Je me suis alors dit que si je devais apprendre quelque chose à Golvandaar, ce serait bien d’en savoir plus sur le monde au-delà. Après quelques années, je décrochai mon diplôme avec mention "ero suuri". J’en étais heureux, même s'il y avait parmi mes camarades ceux qui étaient bien meilleurs que moi. Après avoir suivi une formation généraliste sur les neuf arts arbitrés, je fis une spécialisation en géographie physique et en cartographie. C'est durant cette formation que je partis à nouveau vers Edella pour explorer de nouvelles vallées, cartographier et étudier les sols afin de potentiellement découvrir des métaux précieux à exploiter. Mon groupe était composé de cinq personnes, toutes animées par la même passion pour l’exploration et la découverte. Il y avait Lena, une géologue aux connaissances impressionnantes en minéralogie, toujours prête à partager ses découvertes avec enthousiasme. Ensuite, il y avait Aric, un botaniste qui ne manquait jamais une occasion de prélever des échantillons de plantes rares. Il y avait aussi Nils, un expert en météo, dont les prédictions météorologiques nous avaient souvent sauvés de situations périlleuses. Enfin, il y avait Freja, une cartographe talentueuse avec qui j’avais développé une amitié solide basée sur notre amour commun pour les cartes et l’exploration. Durant une de nos expéditions, nous devions traverser une vallée encaissée lorsque le temps changea brusquement. Une averse s’abattit sur nous, réduisant la visibilité à son strict minimum. Malgré nos efforts pour rester groupés, la violence de la tempête nous sépara rapidement. Le vent hurlait, rendant nos appels inaudibles. Les gouttes de pluie frappaient si fort que mes pensées semblaient se dissoudre dans le tumulte aquatique.

Après une longue marche à crier sous le déluge je tombais par hasard semble-t-il sur une maison… Ou plutôt des formes grotesques d’une maison. La maison surgit des ténèbres avec une présence sinistre, presque palpable. Son architecture défiait toute logique et semblait se contorsionner sous l'averse, comme une créature maudite émergeant d'un cauchemar ancien. Les murs, faits de pierres noircies par le temps et couverts de mousses visqueuses, semblaient suinter une substance indéfinissable, ajoutant une couche de répugnance à l'édifice déjà oppressant. Les fenêtres, ou du moins ce qui ressemblait à des fenêtres, étaient asymétriques, irrégulièrement espacées et d'une forme si tordue qu'elles semblaient hurler une souffrance muette. À travers ces ouvertures béantes, des ténèbres insondables me fixaient, comme des orbites vides d'un crâne antique exhumé des profondeurs de la terre. Le toit, incliné à des angles impossibles, était couvert de tuiles brisées, éparses, et de poutres tordues qui pointaient vers le ciel orageux comme des griffes cherchant à agripper le firmament. En m'approchant, je remarquai que la porte, massive et en bois de chêne sur laquelle des runes étranges étaient gravées. La poignée, froide et déformée, rappelait la patte griffue d’un ours, une invitation sinistre à pénétrer les mystères impies de cette demeure maudite. L'ensemble de la structure semblait vibrer d'une pulsation sourde et menaçante qui résonnait dans mes os et perturbait mon esprit. Il était évident que cette maison n'était pas un simple refuge contre la tempête, mais un portail vers des horreurs indicibles aux confins de la réalité humaine.

Au moment où je m'apprêtais à ouvrir la porte , un vieil homme s’en chargea avant moi et me tire à l'intérieur. L’homme qui m’arracha à la tempête et m’entraîna à l’intérieur était une vision d’épouvante presque aussi dérangeante que la maison elle-même. Son visage était un dédale de rides profondes, chaque sillon semblant raconter des siècles de souffrance et de savoir. Ses yeux, enfoncés dans leurs orbites creusées, brillaient d’une lueur étrange, oscillant entre la folie et une sagesse terrifiante. Sa peau, d’une pâleur cadavérique, semblait presque translucide sous la lumière vacillante des bougies, révélant des veines bleutées qui serpentaient comme des racines maudites. Sa barbe, longue et hirsute, était d’un gris jaunâtre, emmêlée et parsemée de fragments de matières indéfinissables, peut-être des restes de rituels anciens ou des offrandes obscènes. Ses vêtements étaient en lambeaux, des haillons autrefois riches, maintenant réduits à des loques décolorées par le temps et l’humidité. Une cape usée, effilochée à ses bords, était drapée sur ses épaules, s'ajoutant à son apparence spectrale. À sa taille pendait une ceinture de cuir craquelé, ornée de petites fioles et de sacs mystérieux. En m’agrippant, ses doigts glacés transmirent une sensation de terreur viscérale, comme s’ils étaient les vecteurs d’un mal ancien et innommable. Sa voix, lorsqu’il parla, était un murmure rauque et chuintant, émanant de profondeurs inhumaines. Il émanait de lui une aura de mystère et de danger, une présence indubitablement liée à des forces qui transcendaient l’entendement humain. En me tirant à l'intérieur, il jeta un dernier regard méfiant à l’extérieur, comme s’il craignait que quelque chose, ou quelqu’un, nous ait suivis. Puis, refermant la porte avec une détermination presque désespérée, il me fit signe de le suivre, nous plongeant encore plus profondément dans le ventre sombre et énigmatique de la maison. nous arrivâmes dans une pièce sombre et humide, de l’eau ruisselait du toit semble t il. L’homme me fit signe de m’asseoir sur l’un des canapés moisi et je m'exécutais alors. L’homme me regarda avec une intensité troublante alors que je m'asseyais sur le canapé moisi. La pièce était imprégnée d'une odeur de décomposition et de moisissure, et l'eau ruisselait du plafond en un bruit régulier et sinistre. Il s'assit en face de moi sur une chaise bancale, ses yeux brillants d'une lueur fiévreuse dans la pénombre.

"Vous êtes chanceux d'être en vie," commença-t-il d'une voix rauque, presque un chuchotement. "Ces vallées, elles ne sont pas clémentes pour les âmes égarées." Il marqua une pause, me scrutant comme s'il cherchait quelque chose au fond de mes yeux. "Je m'appelle Enoch," poursuivit-il. "Je suis le gardien de cette maison... si on peut appeler cela une maison. Depuis des décennies, je veille sur ces terres et sur les secrets qu'elles renferment." Il se pencha légèrement en avant, ses doigts noueux se crispant sur le bord de sa chaise. "Il y a des choses que vous devez savoir. Ce n'est pas par hasard que vous êtes arrivé ici, jeune homme. Cette maison attire ceux qui cherchent, ceux qui sont en quête de réponses, mais les réponses qu'elle offre ne sont pas toujours celles que l'on souhaite entendre."

Une goutte d'eau glaciale tomba du plafond et s'écrasa sur le sol avec un bruit sourd. Enoch leva les yeux, suivant le chemin de la goutte du regard, puis revint à moi.

"Les sols de ces vallées, ils cachent plus que des métaux précieux. Ils sont imprégnés de l'énergie d'anciens rituels, de sacrifices oubliés depuis des éons. Ceux qui fouillent trop profondément réveillent des forces qui devraient rester endormies." Il tendit une main tremblante vers moi, comme pour s'assurer de ma pleine attention. "Si vous tenez à votre vie, écoutez-moi bien. Quittez ces vallées. Abandonnez votre quête. Les trésors que vous cherchez ne valent pas le prix que vous pourriez payer."

Il se redressa, ses yeux brillant d'une détermination désespérée. "Mais si vous décidez de rester, sachez que chaque pas que vous ferez vous rapprochera un peu plus de la folie et de la mort. Réfléchissez bien, car une fois que vous aurez franchi cette porte à nouveau, il n'y aura plus de retour possible."

Enoch se tut, laissant ses paroles se répercuter dans l'air humide et lourd de la pièce, me laissant seul face au choix qui s'imposait désormais à moi. Je pris une profonde inspiration, rassemblant mon courage pour poser la question qui me hantait depuis que j’avais franchi le seuil de cette maison étrange. "Qu'est-il arrivé au reste de mon groupe ? Est-ce que vous les avez vus ?"

Enoch me fixa de ses yeux perçants, et un soupir lourd s’échappa de ses lèvres desséchées. "Votre groupe... Je crains que leurs destins soient liés à ces vallées maudites. Ceux qui s'aventurent ici disparaissent souvent, engloutis par les ténèbres et les secrets qu'elles renferment." Avant qu'il ne puisse en dire davantage, un bruit sourd résonna à travers la maison, un coup sec et insistant à la porte. Enoch se raidit immédiatement, ses yeux s'élargissant de terreur.

"Non... pas maintenant..." murmura-t-il, se levant précipitamment. "Restez ici, ne faites aucun bruit." Il se dirigea vers la porte avec une hésitation palpable, jetant des regards anxieux autour de lui. Les coups retentirent à nouveau, plus forts cette fois, comme si quelque chose d'urgent se tenait de l'autre côté.

Je sentis mon cœur s'emballer, une peur glaciale s'emparant de moi. "Qui est-ce ?" murmurai-je, ma voix tremblante d'inquiétude. Enoch se tourna vers moi, ses traits marqués par une panique grandissante. "Il y a des forces ici que vous ne pouvez pas comprendre. Si ce qui est à la porte entre, nous sommes perdus." Les coups se firent plus pressants, résonnant à travers la maison comme des battements de cœur monstrueux. Enoch recula lentement, son visage déformé par la terreur. Il tendit la main vers une vieille armoire et en sortit un ancien sabre, ses mains tremblant visiblement. "Ne bougez pas," chuchota-t-il, les yeux fixés sur la porte qui tremblait sous les coups. "Peu importe ce qui arrive, ne faites aucun bruit et ne bougez pas."

Les coups cessèrent soudainement, plongeant la maison dans un silence oppressant. Enoch resta immobile, la lame pointée vers la porte, les muscles tendus, comme une statue de pierre attendant l'inévitable. Après un moment qui me sembla une éternité, un murmure glacial traversa l'air, semblant provenir de toutes les directions à la fois. "Enoch... tu ne peux plus te cacher. Il est temps de payer ce que tu dois." Enoch serra les dents, la panique laissant place à une résignation désespérée. "Non, pas encore. Donnez-moi encore un peu de temps," supplia-t-il, sa voix brisée par la peur.

Le murmure se fit plus insistant, résonnant dans les murs de la maison. "Le temps est écoulé, Enoch. Vous ne pouvez échapper à ce qui est dû." Je restai figé, incapable de détourner le regard de la scène qui se déroulait devant moi, une part de moi comprenant instinctivement que les événements qui allaient suivre allaient sceller nos destins d'une manière ou d'une autre. Le silence qui suivit les murmures semblait encore plus oppressant que les coups à la porte. Enoch, tremblant de la tête aux pieds, fixait toujours l'entrée, son sabre tremblant dans sa main. Une énergie maléfique semblait remplir l'air, palpable et suffocante, alourdissant chaque respiration.

"Enoch," répétait la voix, maintenant plus proche, presque derrière nous. "Il est temps."

L'air devint glacial, comme si toute la chaleur de la pièce avait été aspirée par une entité invisible. Enoch se tourna lentement vers moi, son visage empreint de la plus pure terreur. Ses lèvres se mirent à trembler, mais aucun son n'en sortit. Soudain, la porte s'ouvrit d'elle-même avec une lenteur terrifiante, révélant un abîme de ténèbres insondables au-delà du seuil. Des ombres amorphes ondulaient dans cette obscurité, prenant des formes grotesques et cauchemardesques, leurs contours fluctuant comme des volutes de fumée noire. Une odeur de terre humide et de décomposition envahit la pièce, accompagnée d'un souffle glacé qui semblait murmurer des secrets anciens et maudits.

Enoch recula encore, jusqu'à ce que son dos touche le mur, son sabre désormais pointé vers le sol. "Je vous en prie," implora-t-il, ses yeux écarquillés par la peur. "Donnez-moi encore du temps."

Mais il n'y eut aucune réponse, seulement un silence pesant et implacable, suivi par le son croissant de pas lourds et traînants provenant de l'obscurité au-delà de la porte. Une forme massive et indistincte commença à émerger, ses contours flous et changeants, comme si la réalité elle-même se distordait autour de cette apparition. Je me sentis cloué sur place, incapable de détourner le regard. Mon esprit vacillait à la limite de la folie face à ce spectacle impossible. Les ténèbres semblaient absorber toute la lumière de la pièce, laissant Enoch et moi plongés dans une semi-obscurité glaciale. La créature — car il n'y avait pas d'autre mot pour la décrire — se matérialisa entièrement dans l'embrasure de la porte. Elle était immense, une abomination de chair et d'ombre, ses membres tordus et distordus s'étirant dans des angles impossibles. Des yeux multiples, éparpillés sur sa surface informe, luisaient d'une lueur malsaine et affamée. "Le prix doit être payé," siffla la créature, sa voix résonnant comme un millier de murmures convergents. "Nul ne peut échapper aux anciens pactes."

Enoch s'effondra à genoux, son sabre tombant de sa main et résonnant avec un écho sinistre sur le sol de pierre. "Pitié," murmura-t-il, ses mains tendues en un geste de désespoir. Mais la créature avançait inexorablement, chaque mouvement semblait suinter une malveillance palpable. Les yeux sur sa surface fixèrent Enoch, et une multitude de voix, discordantes et chaotiques, s'élevèrent en un chant funèbre. Je sentis une terreur primale m'envahir, chaque fibre de mon être hurlant de fuir, mais mes jambes refusaient de bouger. Enoch, quant à lui, restait prostré, comme s'il acceptait son sort inéluctable. La créature tendit un appendice visqueux vers lui, et une lueur éthérée sembla envelopper Enoch, le soulevant lentement du sol.

"Le prix est dû," répétèrent les voix, et dans un éclair de lumière malsaine, Enoch disparut, absorbé par les ténèbres.

La créature se tourna alors vers moi, et je sentis une froideur mortelle s'emparer de mon cœur. "Toi aussi, chercheur de secrets, tu as éveillé ce qui devait rester endormi," murmura-t-elle, ses yeux innombrables me transperçant. "Prépare-toi, car ton tour viendra." Les ténèbres qui avaient englouti Enoch et la créature se dissipèrent lentement, me laissant seul dans une maison silencieuse et oppressante. Le choc de ce que j'avais vu paralysait mes pensées, mais un instinct de survie finit par prendre le dessus. J'avais besoin de retrouver mon groupe, de comprendre ce qui leur était arrivé. L'espoir ténu qu'ils puissent être vivants me poussa à quitter cette demeure maudite. Dehors, la pluie avait cessé, mais la brume restait épaisse, enveloppant les alentours d'un voile spectral. Chaque pas que je faisais semblait résonner dans le silence lourd et chargé d'une menace invisible. Le paysage déformé par la brume prenait des contours grotesques, des arbres tordus et des rochers étrangement disposés créant une atmosphère de cauchemar vivant.

Après une marche qui me sembla une éternité, je distinguai enfin des formes familières à travers la brume. Mon cœur s'accéléra alors que j'approchais, reconnaissant les silhouettes de mes compagnons. Mais l'horreur me frappa comme un coup de massue en m'apercevant de leur état. Ils étaient morts, mais pas simplement morts — ils avaient été mutilés d'une manière qui défiait toute rationalité. Leurs corps étaient disposés en un cercle macabre, chacun dans une posture de supplication ou de terreur figée. Leurs visages, tordus par la douleur et la folie, semblaient crier encore silencieusement. Leur peau était d'une pâleur cireuse, marquée par des entailles profondes et des symboles gravés à même la chair. Les symboles ressemblaient à ceux que j'avais vus sur les murs de la maison d'Enoch, des runes anciennes qui pulsaient encore d'une énergie sinistre. Les yeux de Nils et Freja étaient ouverts, mais éteints, fixant le vide avec une intensité morbide. Leurs orbites semblaient avoir été creusées par une force surnaturelle, laissant des cavités béantes qui suintaient une substance noire et visqueuse. Leurs bouches à tous étaient également ouvertes, figées dans un rictus d'agonie, et de leurs lèvres s'écoulait un filet de sang coagulé. Les membres de mes amis avaient été brisés et tordus à des angles impossibles, comme si une force invisible et impitoyable s'était acharnée sur eux. Leur chair semblait avoir été arrachée par endroits, révélant des os blanchis par une lumière malsaine. Des griffes ou des crocs avaient laissé des marques profondes et irrégulières, témoignages de la violence inhumaine de leur mort. Au centre du cercle, une figure plus grande, plus imposante, se tenait debout. C'était Enoch, ou ce qu'il était devenu. Son corps était maintenant une abomination de chair et d'ombre, fusionné avec des éléments monstrueux et grotesques. Ses yeux, multipliés et réarrangés de manière aléatoire sur son visage et son torse, luisaient d'une lueur maléfique.

Il ouvrit la bouche, et un chœur de voix discordantes et hurlantes s'échappa de ses lèvres, résonnant dans l'air comme une lamentation d'âmes torturées. "Vous avez réveillé les anciens, et ceci est le prix à payer," dit-il, ou plutôt une multitude de voix s'exprimant à travers lui. Mon esprit vacilla, l'horreur de la scène me plongeant dans une abîme de folie. La réalité semblait se distordre autour de moi, chaque détail de cette vision infernale gravant un peu plus profondément la marque de la terreur dans mon âme. Je tombai à genoux, incapable de détourner le regard des corps mutilés de mes amis, et de la monstruosité qu'était devenu Enoch. La brume se refermait autour de moi, m'enveloppant dans un cocon d'angoisse et de désespoir, tandis que la voix de la créature, ou des créatures, continuait de résonner dans ma tête, me chuchotant des secrets interdits et des promesses de damnation éternelle. Et c'est ainsi, plongé dans cette horreur indicible, que je compris que la folie n'était pas une destination, mais un voyage sans fin dans les profondeurs les plus sombres de l'âme et de l'univers.

Tremblant de tous mes membres, je reculais lentement, les yeux toujours fixés sur la scène macabre devant moi. Les voix discordantes de l'abomination qu'était devenu Enoch résonnaient dans ma tête, amplifiant le chaos de mes pensées. Mais à travers ce tumulte mental, une seule idée émergea avec une clarté désespérée : fuir. Des rires déments et des murmures insidieux résonnaient autour de moi, mais je me forçais à ne pas écouter, à ne pas prêter attention aux visions effrayantes qui semblaient vouloir s'emparer de ma raison. Chaque respiration était un effort, chaque pas une lutte contre l'envie de m'effondrer et de succomber à la folie. Les nuits étaient les plus difficiles. Les cauchemars me poursuivaient, des visions de mes compagnons mutilés et de la créature abominable me réveillaient en sursaut, baigné de sueur froide. Mais le simple fait d'avoir survécu m'offrait une lueur d'espoir.

Il est évident que personne ne m'a cru à mon retour à la civilisation, on pensa qu’un groupe de brigand nous avait attaqué et que dans ma fragilité j’avais vu des choses ne provenant que de mon imagination. J’ai malgré tout obtenu ma spécialisation érudite avec mention “ero” mais là où je devais être heureux , le sentiment n’y était guère. Arrivé à Golvandaar, j'ai tenté de raconter mon histoire, d'avertir les autorités et les érudits de la grande université sur les horreurs que j'avais vues dans les vallées d'Edella. Mais à chaque tentative, je me heurtais à une force mystérieuse. Un groupe clandestin, dont les membres semblaient avoir une connaissance approfondie des secrets occultes que j'avais découverts, m'a pris pour cible.

Ces individus, opérant dans l'ombre, ont rapidement réduit au silence mes avertissements. Ils m'ont capturé et, sans pitié, vendu comme esclave. Les raisons derrière cet acte restaient obscures, mais il était clair qu'ils voulaient me faire taire. Je savais de toute manière que rien ne serait plus jamais pareil. La terreur de cette nuit hanterait mes rêves et mon esprit pour toujours, marquant le début d'une descente inexorable dans la folie.


Nouvelle écrite par Kaarlo Laïne, mai 524.