Suru'karo

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Le Suru’karo est un des récits religieux les plus largement partagés par les nombreux clans qadjarides qui parcourent le continent. Il est vraisemblablement apparu dans sa forme actuelle dans les décennies qui ont suivi les événements de Mantesa sous l'impulsion de Naya du Charrin, toutefois il demeure largement inspiré par l’antique religion de l’Empire qadjaride.

Terminologie

Le Suru’karo porte deux noms :

Usage

Généralement le Suru’karo est conté par les telesmbods mais cette pratique ne leur est pas réservée. Les tarnos grandissent avec de nombreux récits mythologiques et celui-ci est destiné à leur proposer une explication de la création des mondes. Le Suru’karo prend des formes diverses et existe dans de nombreuses versions différentes selon les régions et les clans. Il est souvent chanté plutôt que dit mais n'est jamais mis sur écrit en vertu de la doctrine qadjaride de la tradition orale et du Paharedji. S’il fait bien partie des fondamentaux du culte qadjaride, le Suru’karo n’occupe pas une place aussi centrale que la Sintie dans le culte d'Arbitrio et n’est considérée par les qadjarides que comme l’un de leurs très nombreux récits religieux.

Récit

Suru'karo

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Lorsqu’il n’y avait rien d’autre que le vide et le silence, vivait dans le Beyn’Djahan le Passeur que l’on appelle aussi Kherad, mais également, avec lui, une autre entité totalement identique, une sorte de jumeau du nom de Hlass. Kherad et Hlass avaient une vision commune de ce qu’ils voulaient faire de ce monde alors encore vide. Ils voulaient unir leurs chants et leur imagination pour créer un monde qu’ils espéraient le plus parfait et le plus vaste possible. Un monde peuplé de créatures diverses et variées. Un jour alors ils se mirent à chanter sans aucune interruption et pendant près de trois ans, ils chantèrent la terre et le feu, ils chantèrent l’eau et le vent, ils chantèrent les arbres et les plaines, les montagnes et les gouffres, mais aussi les animaux et les plantes. Trois ans durant, ils chantèrent pour créer l’Ertä tel que nous le connaissons aujourd’hui. Les animaux qui y vivaient étaient certes tous d’une majesté et d’une élégance incomparable mais Kherad était d’avis qu’ils manquaient de vie et de compréhension par rapport à leur propre monde.

Hlass lui, n’était pas de son avis, il trouvait que le monde qu’ils avaient créé était parfait en tout point. Or Kherad prit la forme d’un animal qu’il imaginait différent des autres, un animal dépourvu de fourrure ou de plume, un animal qui ne se déplacerait non pas sur quatre mais sur deux pattes. Un animal à l’intelligence supérieure et qui serait capable de prendre pleinement conscience du monde qui l’entoure.

En revenant dans le Beyn’Djahan il chanta sans en faire part à Hlass et créa alors cet animal qu’il voulait identique à la forme qu’il venait de prendre. Les premiers hommes arrivèrent sur l’Ertä, mais hélas pour Kherad bien que différents d’aspect par rapport aux autres animaux ils étaient identiques sur la manière de vivre et d’agir, ils étaient comme une coquille vide régit par rien d’autre que leur instinct primaire.

Alors le Passeur eut une idée, il revint sur l’Ertä et s’approcha de l’un des premiers Hommes, il l’observa longuement et souffla sur lui une légère brise qui l’enveloppa. A peine avait-il terminé que les yeux de l’Homme s'illuminèrent et une flamme qu’il ne voyait dans aucune autre créature sur son monde apparût. Le souffle du premier Homme prit vie. Il entreprit alors d’en octroyer un à chacune de ces créatures sur terre.

Mais lorsque Hlass apprit cela il entra dans une rage folle, ne comprenant pas pourquoi Kherad venait de briser cet équilibre qu’ils avaient mis autant de temps à créer. Pour se venger il chanta à son tour, non pas pour créer d’autres créatures, mais dans un premier temps un autre monde, totalement à part de l’Ertä.

Ce monde, il l’appela Kuhja Nahim. Dans celui-ci il fit naître les premières divinités, elles étaient plus fortes et plus puissantes que tout ce qu’on pouvait trouver sur l’Ertä et elles étaient même capables de voyager jusqu’à ce dernier. La première divinité fut Vivada et elle joua le jeu qu’avait imaginé Hlass durant les premiers âges du monde. Vivada était empli de toute la colère et la rage qu’avait Hlass au moment de sa création et embrouilla l’esprit et le souffle de tous les hommes et femmes sur l’Ertä qui s’étaient mis à vénérer leur créateur, Kherad.

C’est ainsi qu’une scission eut lieu, certains continuèrent à vénérer Kherad pour leur avoir donné vie et d’autres interprétaient cela différemment, ils donnèrent un nom différent à Kherad et ils se firent la guerre lorsque la parole n’était plus suffisante pour faire entendre raison.

Voyant cela, Kherad fut pris d’une immense tristesse, ses enfants à qui il avait donné vie étaient en train de s’entretuer et lorsque les premiers périrent il remarqua que les souffles qui enveloppaient leurs corps ne quittaient pas l’Ertä et erraient comme des pauvres hères, des fantômes. Alors il entreprit de chanter à nouveau.

A son tour il créa un monde, le Dahnestan, où le souffle des morts sur l’Ertä pouvait se réfugier après un long voyage. On raconte que pour la première et dernière fois il fût le guide des premiers souffles, il sélectionna les plus forts d’entre eux, ceux qui n’avaient jamais douté de lui et il fit passer les premiers souffles dans le Dahnestan.

De son côté, Hlass, prit d’une rage inapaisable, ne cessa de créer des mondes et des créatures que lui et lui seul avait imaginé, il donna une partie de sa force et de ses talents à nombre d’entre eux dont la capacité de voyager entre tous les mondes. Astraya, Madym ou encore Duja, tous furent le fruit de l’imagination de Hlass. Kherad était trop occupé à s’occuper de ce qu’il se passait sur l’Ertä et ne vit tout ceci que bien plus tard. Les deux entités avaient définitivement cessé toute relation amicale et ne vivaient plus que pour créer leur monde parfait à eux.

Sur l’Ertä, les guerres ne cessaient pas et la scission était si forte que Kherad perdit espoir d’un jour revoir la paix. Il créa un nouveau monde le Farahvani, où des souffles attendaient de pouvoir s’insuffler dans des corps sur l’Ertä et petit à petit il ne se contenta plus que d'accueillir les souffles les plus forts dans le Dahnestan. Même ceux qui croyaient encore en lui ne l’appelaient plus Kherad mais simplement le Passeur.

Kherad fut encore plus attristé par cela et prit Hlass pour responsable de tout ce qui était en train de se produire, estimant qu’il ne comprenait pas les enjeux de tout ce qui se passait actuellement sur l’Ertä. Ils se battirent alors, dans un conflit qui déchira les cieux et fit craquer la terre de tous les mondes créés. Même les plus puissantes divinités n’osaient pas interférer par peur de représailles, pas même Mazabuta. Toutes... excepté Duja qui attendait sagement dans l’ombre qu’une issue se dessine. Lorsqu’il vit que Kherad prenait le dessus sur Hlass, il donna son allégeance au premier cité et entra dans le conflit. Avec son aide, Kherad réussit à vaincre celui avec qui il créa le premier des mondes, il le jeta hors même du Beyn’Djahan, quelque part où personne, pas même lui, ne sait ce qu’il si trouve.

Le Passeur avait abandonné tout espoir d’un retour en arrière. Tout ce qui avait été créé était voué à perdurer dans le temps et rien qu’il ne puisse faire ne pouvait changer cet état de fait. Il contempla son œuvre, ces souffles qui se battaient à cause de lui et il s’en détourna. Il choisit de ne plus jamais influencer l’Ertä et les autres mondes, il prit la décision de n’être qu’un passeur pour les souffles et il ne s’occuperait que des plus forts, ceux étant assez puissant pour mériter de voyager entre les trois mondes primordiaux. Duja fût récompensé de son aide et il le choisit pour être son second. Plus bas sur l’Ertä, certains priaient Arbitrio, d’autres Kherad et d’autres encore n’avaient d’yeux que pour leurs défunts qu’ils appelèrent Ancêtres… Un jour, l’un parmi les derniers cités, Aswad, fut touché par la divinité Astraya et le cours du monde ne fût plus jamais le même.

Spécificités culturelles

  • Angastins : certains clans angastins mettent un point d’honneur à tenir l’intégralité du contenu du Suru’karo secret et tolèrent très mal que l’on en divulgue le moindre aspect à des kharedjis. Leurs telesmbods sont même réticents à en faire un sujet de conversation avec les représentants monachistes comme phalangistes. Chez ces clans, le récit a un statut supérieur aux autres en termes de sacralité et il n’est pas permis d’y ajouter une part d’invention contrairement au reste des histoires religieuses. Les contrevenants s’exposent le plus souvent à un lajj.
  • Asentanis : sous l’impulsion du Clan de Lahin, les clans asentanis ont activement participé à la circulation de ce récit de Mantesa jusqu’à Golvandaar. Ils ont aussi été les premiers à l’abandonner au profit d’une interprétation qadjaride de la Sintie du culte d’Arbitrio donnant plus d’importance au concept d’Adaar et délaissant la multiplicité des mondes du culte qadjaride. Aujourd’hui, le Suru’karo n’est plus raconté que dans quelques clans asentanis mineurs et dans une forme très influencée par le prisme du monachisme.
  • Chorikaves : les chorikaves ont pour coutume d’organiser des représentations théâtrales de ce récit dans un cadre éducatif et privé, où se mêlent danse et chant. Plusieurs membres du clan participent à ce spectacle auprès des tarnos et incarnent les différentes divinités en arborant costumes et maquillage. Les cérémonies de l’Ashani, de l’Insurat, comme du Voroud constituent toutes d’excellents prétextes pour organiser ce rituel. Les qadjarides du clan Yfain emploient même le Souffle de Kherad à cette occasion.
  • Grajamaites : la plupart des grajamaites organisent dès la naissance d’un qadjaride un rituel présidé par le telesmbod du clan qui, seul ou accompagné selon les variantes, souffle au visage du nouveau né pour signifier symboliquement son appartenance à la diaspora. Plus généralement, on l’emploie à l’intention des tarnos lorsqu’on les conseille ou qu’on les réprimande. En effet, les clans du Roment comme de la Dione accordent une signification très importante au vent et au feu qu’ils associent au concept de Souffle. Dans un cadre moins solennel et entre des qadarides plus âgés, le geste demeure répandu et peut tout autant exprimer des encouragements que le dédain et le mépris en fonction du contexte.
  • Honarmides : une minorité de clans honarmides ont repris à leur compte la tradition chorikave des spectacles de danse et de chant. Il leur arrive, lorsque le clan dispose d’assez d’artistes, d’en proposer des représentations publiques lors des foires qadjarides : les noms des mondes comme des divinités sont alors astucieusement changés et on retire la substance religieuse du texte. D’autre part, des clans se sont démarqués par leur production importante de bijoux et de tapisseries à l’effigie des divinités du récit ou des scènes majeures de celui-ci, dans un style figuratif atypique comme le Clan Markhar. Cet artisanat est très prisé au sein du réseau commercial qadjaride mais les honarmides le vendent indifféremment aux adeptes du culte qadjaride comme aux kharedjis, ce qui est parfois source de tensions.

Jugements du Tribunal de Roskilde

Le cas de la Chanson mantésane est régulièrement un sujet de débat pour la communauté érudite de Roskilde. Si la plupart des qadjarides ne considèrent pas ce récit de la création comme un élément singulier de leur culte, le Monastère adaarion comme l’Ordre phalangiste ont toujours cherché à en faire un objet d’étude particulier. Le Tribunal de Roskilde et plus particulièrement son Tribunal de la foi a prononcé plusieurs jugements condamnant le texte ou appelant à la tolérance vis-à-vis de celui-ci. En réalité, la plupart de ces discussions sont spéculatives et rares sont les sages qui peuvent se faire une vague idée de son contenu. Parmi les rumeurs qui circulent chez les religieux monachistes et phalangistes mais aussi dans les clans qadjarides, il se dit que le Clan de Lahin serait le responsable de la fuite originelle qui aurait attiré l’attention des kharedjis sur le Suru’karo ou comme ils l’appellent, "la Mantésane".