Utilisateur:Askoli

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Informations RP
Genre
Femme
Année de naissance
504
Rang
Famille



Quartier




Métier
Métier
Compléments


Art
Gladiatoralisme




Fonction



Origines
Ville d'origine
Région d'origine
Nation d'origine

Informations HRP
Login Minecraft
Arsenius
Rôles


Askoli.jpg

Aptitudes

• Combat T3

Bouclier (régulier) Hache/Masse (Expérimenté) Mains nues (intermédiaire)

• Art : Gladiatoralisme

• Art  : Graffitis runiques (Peinture)

• Langue : Dialecte vahnamaate

Escalade

Rapine

Description physique

Askoli est une jeune femme aux épaules larges et à la stature respectable : elle dépasse de peu le mètre soixante-dix. Elle est de forte constitution mais l’absence de formes marquées comme de muscles saillants sur sa silhouette révèle sa condition ascétique. Ancrée sur de solides jambes, ses hanches sont étroites et le diamètre de ses bras n’a rien à envier à celui de ses homologues masculins. On lui connaît une démarche assurée.

Sa figure est surplombée par une tignasse de cheveux noirs désorganisés. Raides, ils lui tombent jusqu’en bas des épaules, aussi il lui arrive de les nouer sommairement voire de les couper net et court lorsqu’ils deviennent trop gênants. Ses oreilles n’ont rien de notable sinon la crasse qui les habite. Askoli présente une tête plutôt ronde et une mâchoire aux angles apparents, agrémentée d’un menton saillant. Le contour de ses lèvres n’aurait rien d’imprécis ou de grossier s’il n’était pas fendu par une petite cicatrice juste assez visible pour être disgracieuse. Son nez discret porte lui aussi les stigmates de quelques coups qui l’ont fracturé ; au moins il n’a rien perdu de sa droiteur. Un front dégagé - ses détracteurs diront vaste ou proéminent - où se dévoile la pâleur de son teint, lequel produit un fort contraste avec son regard sombre, porté par deux petits yeux vifs mais cernés de fatigue. Ses traits s’illuminent parfois le temps d’un sourire, et de nouveaux plis apparaissent alors sur sa face et l’adoucissent au point de lui rendre un air enfantin.

La nordache parle d’une voix féminine aux accents juvéniles. Ses phrases sont naturellement ponctuées de mots maladroitement empruntés aux dialectes nordiques - lorsque son auditoire le lui permet. Seul l’accent guttural qu’elle a acquis au sein de sa communauté a le mérite d’être relativement authentique. Ceci étant, il n’est pas dit que les nordaches qui l’empruntent, surtout issus de l’Hukkomelsen, ne le font pas en majorité pour se donner un genre. Askoli a un tatouage de piètre facture sur l’omoplate gauche, là où il ne risque pas d’être découvert par un col trop large. Il fait la taille de la paume d’une main et représente un heptagramme des Sept déesses réunies autour de l'œil d’Arbitrio. Elle a un autre tatouage, plus simple, à la cuisse gauche : il s’agit d’un ersatz de logogramme qui, en quelques traits, symbolise Helgi sur le majestueux oiseau Minithyr.

Description morale

Askoli est une nordache dont la vie a été bouleversée par les émeutes du quartier nordique en 512. Elle n’a rien d’une lettrée et sa compréhension du monde qui l’entoure n’a jamais été enrichie du savoir enfoui dans les ouvrages. Si elle est capable de communiquer dans un capitalin des plus corrects, celui-ci n’a rien d’exceptionnel et reste inlassablement marqué par un vocabulaire vulgaire. En revanche, Askoli a baigné durant toute son enfance dans la culture riche et atypique du Quartier nordique de la Sublime où vit sa communauté. Ayant fréquenté les jeunes de l’Hukkomelsen jusqu’à leur exil, elle est emprunte d’une fascination restée à ce jour intacte pour les terres de Nivôse éternelle par delà la chaîne adaarionne, dont elle se sent issue. En dehors de son quartier où on lui parle souvent des Sept et du Thème de Zaraga, Askoli découvre les bandes de la Capitale en demeurant tout au long de sa vie sous la vigilante protection de son grand frère Bagbo, de dix ans son aîné, un jeune gladiateur prometteur. Il est celui qui lui apprend à avoir confiance en elle et à se dépasser. En dehors de ceux qu’elle considère comme sa famille au sens large, elle appréhende avec méfiance les étrangers qui semblent accourir des quatre coins du monde jusque dans les Dix mille rues. Toutefois, il suffit de quelques échanges pour qu’Askoli se montre tolérante : elle sait par expérience que les minorités sont des cibles idéales et qu’il faut savoir faire preuve de solidarité pour survivre.

Pour se fondre dans la société capitalarde, elle a dû souvent faire preuve d’une grande résilience mais aussi d’une certaine adaptabilité. Elle méprise sans distinction les représentants directs de l’autorité - en particulier les gardes - comme les grands symboles du Royaume ou de sa noblesse, à commencer par le roi. Sa rancœur est en partie motivée par le profond sentiment qu’Askoli a toujours eu de ne pas être à sa place ; un sentiment renforcé par les exactions du peuple capitalin à l’encontre des siens. En tant que gladiatrice, Askoli a dû endosser dans une multitude de rôles mythologiques, historiques ou populaires, dont certains avaient clairement vocation à l’humilier en raison de ses origines. Il lui est toujours difficile de distinguer le vrai du faux dans les histoires arrangées qu’elle contribue à mettre en scène, beaucoup ne sont en fait que des légendes. Pour Askoli, l’identité nordache a toujours été un questionnement plutôt qu’un motif de fierté, même lorsqu’elle tentait de se convaincre du contraire. Changer constamment de visage, être applaudie ou huée selon le protagoniste qu’elle incarne, se grimer même en homme parfois, renforcent cette confusion au point de rendre la nordache cynique à bien des égards.

Askoli n’en est pas pourtant une personne esseulée ou mortifiée par la tournure catastrophique de sa vie. Il lui apparaît évident qu’il y a du bon à tirer de la plupart des gens, et en particulier de ceux qui partagent son statut. Lorsqu’elle était au plus bas, elle s’est même laissée aller à se lier d’amitié avec des esclaves de l’ergastule de l’arène. Elle ne place que peu de confiance dans la justice de l’Ordonnance et la profusion dans laquelle vivent les bonnes gens lui semble indécente au regard de leur absence de mérite voire pour parler plus franchement, de leur lâcheté. Elle leur préfère les plébéiens, les indigents, et même la plupart des malfrats des bandes - à l’exception bien sûr de ceux qui par les aléas du sort sont devenus ses ennemis comme les débardeurs rouges.

Au quotidien, Askoli est plutôt facile à vivre même si elle manque cruellement d’éducation. Joueuse, elle est bon public et sait s’émerveiller d’un rien. Avec elle, le premier contact est déterminant, elle a souvent des idées très arrêtées et si elle a les moyens de les faire savoir - le plus souvent par des railleries - elle n’hésite pas, car il lui est déjà difficile de se contenir dans les situations où ce type de commentaire en ferait la cible de brimades. Dernièrement, la jeune femme s’est révélée particulièrement abattue. Elle se doit cependant de faire face, notamment pour préserver le jeune Rue que sa tentative d’évasion précipitée a plongé dans une situation périlleuse. Askoli s’en veut pour ses dernières erreurs qui ont fait d’elle une esclave. Il lui semble cependant que cette misérable condition apporte aussi son lot d’espoir : elle n’aura pas à épouser la Jonquille et devra recommencer sa vie loin de cette ville qui, avec le temps, lui était devenue étrangère. Ce n’est peut-être là que le début de son odyssée.

Histoire sur Esperia

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Une statue d'Askoli installée à l'arène du Bourbier en 525, peu après sa mort.


Askoli est vendue comme esclave sur Esperia à la mi-mai 522. Après quelques péripéties, elle est cédée par les capitalins Bayard et Réjane Renoird à l'Ordre Phalangiste qui l'affranchit au cours du mois de novembre. Son jeune ami phalangiste Rue l'acrobate regagne l'Ancien Monde après avoir retrouvé la liberté.

Elle découvre les siens, établit des liens fraternels avec eux en participant à la fondation de la Tribu Söroja et est régulièrement accusée de vols et de saccages par les autorités de la ville. Sous l'égide du thrall Onak et de Rüne la Sévère, elle abandonne le culte d'Arbitrio et le monachisme pour embrasser son identité vaahva en se convertissant au Culte des Sept Mers et en apprenant le dialecte vahnamaate.

En l'an 524, Askoli s'associe à l'adaarion Kaarlo de Kraanvik pour écrire Sept Histoires et Chansons d'Esperia selon Askoli la Zarègue, un ouvrage épais qui retranscrit son épopée sur l'île et l'évolution d'Esperia depuis son arrivée. Rue l'acrobate, de retour de la Capitale, découvre que son amie nordache a beaucoup changé.

À la fin de cette même année, elle est blessée mortellement lors du baroud d'honneur de la Tribu Söroja au cours duquel le Grand Intendant Lothaire, ses sbires et les derniers vaahvas sont tués. Elle s'éteint quelques jours plus tard au dispensaire le 13 décembre 524.

Histoire dans l'Ancien Monde

504 (Naissance)

Askoli naît dans un islet miteux du quartier nordache. Une des raisons qui explique la médiocrité du statut de son foyer au sein de la Sublime est son attachement à un simulacre de culture nordique qui entrave les Belislet de génération en génération à chacune de leurs rares tentatives d’élévation.

La mère d’Askoli, Branhilde, est une humble apothicaire ayant toujours œuvré pour la Guilde des médicastres. Le reste du temps, elle a un emploi qui l’épuise dans le quartier voisin de la Puante chez des teinturiers. Branhilde est une femme réservée et discrète, largement coutumière de la tradition capitaline, aussi elle a obtenu de ses patrons une maigre solde tout juste suffisante pour couvrir les besoins de son foyer bien qu’elle ait recourt non seulement à la solidarité de la communauté nordache mais aussi à la charité monachiste du moine Grandes Cernes. Ses origines nordiques remontent à la fuite de Septentrion par les colons impériaux et les convertis au culte d’Arbitrio en 327. Elle a rencontré Syrus aux alentours de 487, quand celui-ci a débarqué dans le Quartier nordache où il a bénéficié d’un excellent accueil avant que déjà, Grandes Cernes ne les marie.

Syrus est un immigré d’origine zarègue ayant vécu sa jeunesse dans la ville forteresse de Baenum Sigur, expulsé successivement de la Zaraga puis des Marches car vaahva mais de culte arbitré. Dès sa naissance, il prend toutefois le soin d’appliquer sur le front de sa fille son pouce couvert d’un peu d’aquarelle bleue ; un geste qu’il a toujours vu faire dans les Maahvitts. Après avoir trouvé refuge au sein du Quartier nordique de la Sublime, il épouse Branhilde et s’établit durablement au sein de la communauté. En tant que gladiateur, il a connu un très modeste succès au début des années 490. Il a gagné un pécule décent, et surtout, il a fait la fortune de son ami Yonderick, un nordache amateur de paris qui cherche à s’émanciper de sa condition. Depuis les années 500, sa connaissance des équipes des brigues est limitée et il ne parvient plus à gagner grand-chose en pariant. Dès lors, il vit plutôt à la charge de son épouse en attendant que son fils ne soit en âge de combattre dans l’arène à son tour et en l’entraînant assidûment. Il passe beaucoup de temps auprès d’Olafur Belislet, son beau-père et le grand-père maternel d’Askoli.

Olafur Belislet est un vieil homme qui a fait son temps comme caboteur sur le canal Sybille et le canal Antagon jusqu’au Réservoir. Il lui arrive encore de mettre ses services à disposition des voyageurs mais il passe désormais le plus clair de son temps dans l’Austre et à son embouchure à pêcher des trésors sordides jetés par les capitalards plutôt que des poissons. Il vit discrètement avec le reste de la petite famille et dédie alors son temps à l’éducation du jeune Bagbo qui ne tient pas en place. Pour lui apprendre la patience, il le fait travailler avec des couturiers de la communauté à la réalisation d’une grande tapisserie représentant un heptagramme des déesses agrémenté d’une étoile capitaline.

En effet, Askoli n’est que la seconde enfant de la petite famille des Belislet, le premier étant son frère Bagbo de dix ans son aîné, qui fréquente alors déjà certaines raclures précoces de l’Hukkomelsen. Entraîné aux arts martiaux par son paternel dès son plus jeune âge, il se destine à un avenir de gladiateur sur ses traces à l’arène de la Sublime. Pour l’heure, il participe surtout à des combats de rue, soit accompagné par Syrus soit par ses propres camarades. Sans se montrer très concerné par la défense de ses pairs ou de son identité, il passe le plus clair de son temps à jouer les gros bras et s’adonne à une délinquance juvénile fort développée chez les nordaches. C’est un garçon épanoui dont la seule obsession est d’être digne des exploits de son père - amplement fantasmés.

505-506 (1-2 ans)

Askoli évolue la plupart du temps dans la cour intérieure de l’islet dans lequel sa famille loge. Il s’agit d’un édifice très vieux et qui menace de tomber en ruines. Bagbo et sa sœur disposent d’une chambre à eux, il leur est permis de descendre librement. Le plus souvent, c’est Syrus qui garde un œil sur le bambin mais l’aîné doit aussi endosser nombre de responsabilités à l’égard de la cadette. Il n’a pas encore conscience du devoir qui lui incombe dorénavant et il préférerait pouvoir passer tout son temps hors de la maison familiale. L’entresoi est de mise au sein de la communauté en particulier pour les jeunes. L’immense majorité de leurs connaissances sont d’origine nordique et cet horizon ne s’élargit qu’occasionnellement lors des sorties.

Felgur est un camarade de jeu récurrent pour Askoli. Il est son cousin par leurs mères qui sont les deux sœurs d’une plus vaste fratrie. C’est un enfant pénible, souvent malade et son seul véritable mérite est de tromper l’ennui de la nordache lorsqu’ils se chamaillent. Ses parents tiennent un petit étal où ils vendent des grillades nordaches, c'est-à-dire essentiellement des poissons rôtis et épicés. Ces mets sont réputés parmi les classes populaires de la cité. Ceux des parents de Felgur se vendent jusque dans les Nouveaux Islets. Les odeurs atypiques qui s’en dégagent participent à l’éveil des sens d’Askoli. Une fois, elle s’étouffe sur une arête et elle manque d’y passer. Elle n’est sauvée que parce que le père de Felgur prend l’initiative de la secouer tête à l’envers devant des clients et des passants consternés. Parfois, un chien à poils longs que certains voisins appellent Okbomeril traîne dans la cour. Il est nettement plus intéressant que Felgur mais la mère d’Askoli, Branhilde, le chasse systématiquement : elle prétend qu’il est sale car il vient du Cad, un des quartiers qui jouxtent le Quartier nordique.

Un jour, Askoli qui joue dans la cour tombe nez à nez avec trois hommes de la Guilde des Collecteurs, menés par un borgne répondant au nom de Vieux Gilque. Comme ils toquent à plusieurs portes sans qu’on ne leur réponde, Askoli les interpelle innocemment ainsi que le ferait un jeune bambin et par méchanceté, ils s’amusent à la terrifier. Ils sont entrés là grâce à l’imprudence de Bagbo, qui se rend compte de son erreur en revenant sur ses pas. Il reconnaît en un instant le Vieux Gilque - il l’aurait fait entre mille - et ne prend que le temps de sortir pousser un cri vers la rue avant de revenir en trombe vers les trois, et de s’interposer entre eux et sa sœur. Le jeune nordache ne fait pas le poids et le Vieux Gilque commence à lui donner une bonne correction, jusqu’à ce qu’une bande d’adolescents enragés ne déboule pour battre les Collecteurs en retraite.

Après cet incident, Bagbo s’implique autant qu’il le peut dans l’Hukkomelsen dont sont issus les camarades qui l’ont sauvé. S’il en était déjà un membre assidu, il a vécu cette intrusion comme une attaque dans sa chair et craint pour la sécurité de sa sœur. L’Hukkomelsen est avant tout une milice de quartier dont la plupart des membres sont des jeunes miséreux. La bande comporte en effet peu de femmes et d’hommes mûrs. Leurs armes sont généralement de mauvaise facture. Bagbo déambule bientôt avec ses camarades nordaches pour assurer la protection des siens, gourdin à l’épaule. Il fait encore partie des plus jeunes mais reçoit les encouragements de tous. Seule Branhilde désapprouve ostensiblement ce comportement et cet engagement précoce qu’elle voit d’un mauvais œil. Olafur lui explique que le jeune Bagbo sortira inévitablement du Quartier nordique ; qu’il ferait mieux d’y avoir des amis pour les décennies à venir et qu’il ne faut pas l’isoler. Syrus est ravi du caractère teigneux de son fils, et bien que certains désapprouvent les actions les plus violentes de l’Hukkomelsen, il est fier que sa progéniture se sente nordique et voit là les prémices d’une vocation aux armes.

Olafur ne sait plus vraiment parcourir de longues distances à cause de ses jambes mais il est le propriétaire d’une petite barque sur le canal Sybille et il a encore toute sa tête, l’âge n’a fait que prononcer certaines de ses tendances excentriques. Dans le temps, il remontait jusqu’au réservoir et transportait les voyageurs sur le canal Antagon à destination du port. Il est totalement indifférent aux odeurs pestilentielles qui émanent du quartier de la Puante et traversent le quartier nordique, contrairement à Askoli qui s’étrangle à chaque relan quand elle l’accompagne. Olafur est le premier à prendre le temps de lui expliquer l’existence des Lohikarmes et des Sept déesses ; l’essentiel des histoires qu’il raconte les concernent et il les tient pour vraies.

507 (3 ans)

Branhilde ne cherche pas à faire des origines d’Askoli une fierté pour elle. Syrus, qui fréquente régulièrement le Monastère Apothi-Aymeric et se montre particulièrement dévot avec la ferveur des convertis, tient à ce que son enfant ait une instruction religieuse arbitrée. Selon la volonté de sa mère, c’est le moine Grandes Cernes qui s’occupe d’elle. Grandes Cernes est un moine nordache qui officie dans le quartier de la Foire et des Nouveaux Islets depuis une petite maison de charité. Il enseigne à Askoli l’essentiel de ce qu’un enfant doit savoir sur le rite adaarion lors d’Oppi qui lui sont réservés à elle, son cousin Felgur, et d’autres enfants du coin. Grandes Cernes est d’un tempérament particulièrement effacé qui n’en fait pas un tuteur passionnant. Les heures passées en sa compagnie sont tantôt intéressantes, tantôt désespérément ennuyeuses pour Askoli. Au moins, le moine a réponse à tout dès lors que les enfants lui font part de leurs craintes existentielles qui les assaillent déjà. Il est rassurant de mettre un nom et à défaut d’un visage, une image sur ce Créateur absolu au-dessus de tous. On le représente par un œil intrusif et dont la paupière ne se déploie jamais.

Bagbo est reçu au sein d’une des écoles de gladiateurs les moins prestigieuses dans le quartier de l’arène plus à l’est au sein de la Sublime. Ses camarades nordaches en font un phénomène et il aime jouer les caïds. Askoli grandit et découvre avec émerveillement l’activité de son frère et de son père alors qu'elle n'est qu’une très jeune enfant. Sa vie sera dès lors ponctuée par ces spectacles qui se déroulent tantôt dans des tavernes tantôt directement dans la rue et auxquels elle s’imagine participer dans ses rêveries. Toute la famille doit se serrer la ceinture pour que l’aîné accède à cette école ; cela est aussi permis grâce au pécule gardé de côté par Syrus et par sa relation avec son ami Yonderick dit la Jonquille, détenteur d’une petite équipe au sein de la brigue des bleus.

Bagbo se fait connaître lors de ses combats ou représentations de rue sous le nom du Fovomastodonte. Lorsqu’Askoli lui demande pourquoi il a choisi ce curieux nom, il lui rappelle cette histoire que son père raconte ; avec le reste de son équipe, ils auraient tué un spécimen ramené des plateaux de calcaire romentins jusque dans l’arène de la Sublime, dans les années 490. Le jeune nordache Bagbo est déjà assez grand pour son âge, mais surtout, sa carrure lui permet de prétendre à un tel surnom. Il semble constitué tout d’un bloc et ses adversaires doivent d’abord faire preuve de courage pour lui faire face lorsqu’ils l’affrontent pour ensuite prétendre rivaliser. Le plus souvent, ces altercations très encadrées ont lieu entre les jeunes de l’Hukkomelsen eux-mêmes, mais bientôt, ils iront se risquer par delà leur quartier pour espérer gagner quelques royes en pratiquant la lutte dans des cercles de combat et d’autres activités moins honnêtes. Les nordaches font surtout dans l’intimidation et la défense du Quartier nordique, mais à ces nobles ouvrages s’ajoutent occasionnellement l’usure, le prêt sur gage et la collecte de dettes. Ils se fédèrent principalement pour résister face aux discriminations ou agressions qui les touchent. En outre, ils s’opposent fermement à la clique des débardeurs rouges qui pullulent dans les quartiers du port. C’est cette année qu’Irene Balling, qu’on surnomme la “Crâneuse” en raison de la méthode qu’elle emprunte afin d’estropier puis de mettre fin aux jours de ses victimes, prend le contrôle de l’Hukkomelsen. Les Belislet ne la fréquentent pas ce qui ne les empêche pas de la tenir en respect.

Olafur Belislet s’éteint emporté par la vieillesse et la maladie. Branhilde est si triste qu’elle accepte que le chien Okbomeril vienne dormir dans l’islet. Des dernières semaines de la vie de son grand-père où il perd progressivement la tête, Askoli retient sa piété envers Arbitrio et son désir fou - que tout le monde fait mine de ne pas entendre - d’être mis en terre dans les Maahvitts comme ses aïeuls. Cette requête à l’aube de la mort finit de convaincre Askoli que le Nord est une terre sacrée, arpentée par des êtres supérieurs à ceux qu’elle connaît, elle qui est née loin de chez elle parmi ceux qu’elle apprend à appeler “les sudistes”. Comme elle avait l’habitude de parcourir le canal Sybille avec Olafur, Askoli se souviendra à chaque fois de lui en le contemplant, en particulier lorsque l’eau se pare de couleurs surprenantes toujours plus variées en provenance des teintureries de La Puante. C’est ainsi qu’elle imagine ces exotiques Sept mers - l’odeur en moins.

508-509 (4-5 ans)

Askoli se lie d’amitié avec Horsten, de deux ans son aîné, un grimpeur maladroit qui semble s’être donné pour mission de faire la guerre aux chats du quartier. Ils s’aventurent autour de leurs islets mais ont pour interdiction de se rendre dans le Cad juste au nord dans sa petite cuvette naturelle. En effet, s’ils peuvent bénéficier de la bienveillance de la communauté nordache dans leur quartier, ce n’est plus le cas dès lors qu’ils s’aventurent vers le Labyrinthe largement acquis aux débardeurs rouges, la Puante en guerre quasi-constante avec le quartier nordique, et Bourg-en-les-murs leur est naturellement défendu car séparé des autres quartiers par une haute muraille. Cloîtré à l’ouest des dix milles rues et jouxtant tout de même le port et ses quartiers les plus malfamés, le quartier nordique n’est pas idéal pour voir se développer son enfant. Parfois, Branhilde accompagne Askoli, Felgur et Horsten plus à l’est jusque dans le domaine de Bois-Empire où ils ne restent jamais très longtemps car traités comme de vulgaires braconniers. Ils peuvent aussi se rendre à l’étal des parents de Felgur qui ne manquent jamais de leur offrir le repas généreusement. Horsten est bientôt réquisitionné pour mettre la main à la patte pendant que Felgur et Askoli jouent dans leur champ de vision. Les grillades nordaches sont délicieuses lorsque l’assaisonnement du chef est soigneusement préparé, les plus malins se procurent un royet, un pain rond qu’on vend à une pièce comme son nom l’indique, pour les fourrer du poisson encore fumant.

Branhilde aimerait faire l’éducation de sa fille mais ses deux emplois et sa santé qui ne va pas en s’améliorant ne le lui permettent pas. Si elle disposait de ce temps, elle en profiterait pour lui enseigner tout ce qu’elle sait des bonnes manières et le capitalin le plus correct. Elle se souvient avec amertume quand, dans sa jeunesse, elle avait cherché à devenir domestique mais que son subtil accent et son lignage constituaient le plus souvent un obstacle infranchissable. Yonderick dit la Jonquille, ramène justement au Quartier nordache un esclave vanhamaate qu’il a acheté à l’arène et qui aurait été vendu depuis Uuroggia jusqu’ici en Albunae. Sous les yeux ébahis des badauds qui se rassemblent, l’homme, âgé d’au moins quarante ans, se montre tout à fait hostile à l’égard de ceux qui pourtant, lui ôtent ses chaînes et lui promettent un affranchissement rapide. Là où les nordaches croient accueillir un lointain cousin qui leur aurait été enlevé, le vaahva en question ne voit en eux que d’étranges bonhommes du sud qui prétendent être ce que de toute évidence ils ne sont pas. La confusion n’est que de courte durée puisque l’homme s’accoutume peu à peu du mode de vie capitalin et se montre docile plutôt que révolté quoique ses insultes envers ses sauveurs, proférées avant qu’il ne se résigne, ne témoignent pour Askoli de son incompréhensible ingratitude.

510 (6 ans)

Bagbo a été durement rossé par un de ses rivaux, Urfan, alors qu’il se trouvait dans le Cad. Urfan est un colosse également membre de l’Hukkomelsen qui lui reproche d’avoir eu une liaison avec son amant, un immigré d’origine uuroggiane nommé Ronsäg. En plus des coups, Urfan le menace d’appliquer sur lui une version détournée et franchement douteuse du Sortilège de Sinine qui terrifie le jeune nordache : à l’aide d’un roye qu’il jettera à pile ou face, son agresseur lui explique qu’il déterminera lequel de ses testicules il sectionnera s’il lui cause encore du tort. Bagbo rentre terrifié, il prétexte à ses parents que l’incident a eu lieu dans l’un des cercles de combat des brigues du quartier des Rues aux couleurs. Il explique qu’il a été agressé en tant que nordache bien que ce ne soit pas le cas. Les attaques contre la communauté sont monnaie courante. Syrus voudrait venger son fils mais Bagbo ne sait pas désigner de coupable, il soutient qu’il ne connaît pas l’identité exacte de ses agresseurs. Son père est loin d’imaginer qu’il s’agit en fait d’un autre nordache dont il connaît le nom et les parents : Urfan.

Pendant sa longue convalescence où il ne peut pratiquer son métier, Bagbo se fait une amie qadjaride du Clan de la Source qui lui enseigne la pratique du crachage de feu : Daryah. Il s’agit d’une des apothicaires du clan, que Branhilde a rencontré par l’intermédiaire de la Corporation médicastre. Elle ne s’attendait pas vraiment à ce que la qadjaride, d’abord venue pour aider à soigner le jeune homme, prenne le temps pour lui enseigner un peu de son art qu’elle a spécifiquement appris pour un numéro qu’elle opère lors de foires qadjarides. Evidemment, Askoli s’émerveille de voir son frère acquérir un nouveau talent. Elle ne souhaite pas se risquer à l’imiter. Branhilde qui est scandalisée à l’idée que Bagbo ait été se battre non loin dans le Cad lui défend de sortir sans sa sœur. Elle n’imagine pas que le nordache aura l’imprudence de l’emmener dans des endroits malfamés. En effet, Bagbo n’ose plus se rendre dans le Cad pour un temps puisqu’accompagné d’Askoli. Celle-ci devient cependant sa principale supportrice lorsqu’il se rend jusque dans les Rues aux couleurs pour échanger quelques coups. Ils sont généralement accompagnés de Horsten, de camarades de l’école de gladiateurs de Bagbo et de plusieurs amis de l’Hukkomelsen ; Askoli ne s’en souvient pas bien mais elle est presque sûre qu’Ronsäg en faisait partie. Felgur n’est pas convié car il est de notoriété publique que c’est un rapporteur. La fillette s'époumone avec ferveur et apprend à retenir ses larmes lorsque son frère se fait malmener.

Syrus se fait vieux, il dépérit plus vite que son épouse. Il passe beaucoup de temps avec Askoli en l’emmenant jusqu’au port de la Sublime où ils observent le Ponant et l’activité des pêcheurs, des marins, des charpentiers, des fabricants de voile. Ils se rendent sur les rives de l’Austre, et parfois se contentent d’arpenter les eaux douteuses du canal Sybille qui traverse le quartier nordique. Syrus raconte à sa fille sa jeunesse au sein d’une tribu sédentaire de Baenum Sigur et son douloureux exil. Il lui explique que bien que n’ayant jamais habité les côtes, il a effectué ce qu’il présente comme un pèlerinage vers la Huiskutta, et que depuis, se trouver face à la mer - et dans une moindre mesure face à un cours d’eau - lui évoque ses terres natales et le plonge dans une profonde nostalgie. Askoli s’inquiète sincèrement, si jeune, il lui semble déjà qu’elle ne se trouve pas tout à fait à sa place. De ces épisodes récurrents, elle retient une fascination certaine pour la terre fantasmée dont elle se sait issue. Principalement par le biais de de ses plaintes incessantes, elle convainc son paternel de ne plus l’emmener promener près des eaux usées du quartier des Senteurs qui l’incommodent. Askoli se voit attribuer par son père le surnom affectueux de “Sininite”, un mot qui vient directement de par delà la chaîne adaarionne et qui désigne chez leurs aïeuls les vaahvas immatures, puérils et paresseux.

511 (7 ans)

De l’autre côté de la cour intérieure sur laquelle donnent les chambres de la famille au sein de leur vieil islet, un effondrement survient du fait d’infrastructures rongées par la moisissure. Deux familles nordaches proches des Belislet sont endeuillées et l’événement est tragique pour la communauté toute entière. L’islet, déjà encombré de cabanes et d’abris de fortune érigés par la force de la volonté et du rafistolage s’en voit définitivement défiguré ; sa cour intérieure donne maintenant sur l’une des rues qui l’entourent. L’Hukkomelsen et Balling se démènent pour organiser le secours aux victimes. Provisoirement, les Belislet en accueillent deux qui se retrouvent sans logis. Ils sont sympathiques mais Askoli s’en souvient surtout car elle en est réduite à dormir près d’Okbomeril par manque de place.

Bagbo fait ses premières apparitions à l’arène de la Capitale dans une équipe de nordaches de la brigue des bleus. Bien sûr, il bénéficie déjà de l’expérience qu’il a acquis dans les cercles de combat moins prestigieux voire clandestins des Rues aux couleurs, du Quartier Nordique, du Quartier des Nouveaux Islets ou même du Cad. Askoli participe enfin à certaines représentations ce qui lui procure une immense satisfaction. La petite ne combat pas et se cantonne à un rôle de figuration symbolique auprès de son glorieux frère ; elle sert de damoiseau en détresse ou de jeune écuyère, mais ce sont là ses premiers pas sur scène et elle en tire une grande fierté. Parfois les deux jeunes s’entraînent même avec leur vieux père dans la cour intérieure de l’islet. Il n’est plus très dégourdi mais sa discipline est intacte et chacun de ses conseils précieux. Il transmet à Askoli son intérêt pour la lutte au corps-à-corps à laquelle elle s’exerce avec moult difficultés sur un Bagbo hilare. Plus tard, elle mettra à profit cet enseignement grâce à l’usage de cestes. Pour l’heure, elle se fait souvent écarter pour que Syrus et Bagbo puissent exécuter des mouvements plus techniques et plus violents. Bagbo aime plutôt défendre sa sœur. Il la place sous la protection de ses jeunes amis de l’Hukkomelsen mais il est souvent pris de court par le caractère teigneux d’Askoli qui lui épargne déjà de se faire marcher sur les pieds. Branhilde se rend compte qu’elle ne fera pas d’Askoli l’apprentie apothicaire qu’elle espérait.

Horsten est la cible de brimades de la part de jeunes eyjarskas de la klika de Veronika Gadelin. Alors qu’il tenait l’étal des parents de Felgur, les hommes de Gadelin laissent tout en pagaille et renversent les grillades, dérobent les recettes. Bagbo et Syrus sont furieux, ils veulent faire savoir qu’ils ne laisseront pas ce genre de comportement impuni. Avec plusieurs braves hommes et femmes nordaches, des jeunes de l’Hukkomelsen et le splendide Okbomeril, ils se rendent jusqu’au quartier de Belle-colline pour obtenir réparation. Même Urfan est de la partie pour impressionner les malfaiteurs. Il est décidé qu’un combat règlera ce différend. Bagbo bat son adversaire à mains nues sous les cris des deux camps mais les nordaches doivent fuir car la foule d’eyjarskas membres ou non de la Klila converge vers eux pour venger le leur humilié quelques instants auparavant. Peu de temps après, Grandes Cernes reçoit toute la petite famille dans la maison de charité où il officie pour réaliser la bénédiction d’appel de Bagbo. Il s’agit de l’aboutissement de ses classes, Askoli se galvanise d’être l’une des personnes à qui on demande de tenir l’épaule du gladiateur nordache lorsqu’il reçoit le rôle de protecteur.

512 (8 ans)

Bagbo et ses camarades de l’Hukkomelsen participent à leur échelle à la guerre secrète qui agite la Sublime depuis la mort d’Adryan II. Askoli n’a encore que 8 ans, mais toute cette agitation la fait rêver elle aussi. On raconte que tous les gardes ont abandonné leur poste, que les nobles ont fui la ville en apportant avec eux toutes les richesses du trésor royal. Concrètement, ils se contentent de suivre les mouvements de panique à travers la ville et jouent à la chasse au trésor sur leur temps libre. Un soir, Okbomeril aboie à tout rompre inexplicablement. Quelques instants plus tard, une foule immense envahit les rues du quartier nordique et donne l’assaut de part en part des islets. Les voix grondent, les menaces laissent déjà place aux actes, on cherche à venger les morts des Marches. L’essentiel du voisinage se cache dans une des caves appartenant à l’une des familles, il s’y terrent dans le noir et le silence.

Urfan, l’amant d’Ronsäg et le rival de Bagbo qui l’avait passé à tabac est mort pendant les émeutes. Avec d’autres gros bras de l’Hukkomelsen dont Irene Balling, ils ont défendu les islets du quartier toute la nuit alors qu’ils étaient attaqués sans distinction. S’il n’avait en rien réussi à contenir la violente émeute qui les prenait tous pour cible, sa volonté était intacte quand, la jambe déjà perforée d’une fourche de part en part, il tenait tête aux derniers assaillants qui laissaient peu à peu place à des pillards moins vigoureux mais plus pragmatiques. Urfan trouve la mort au petit matin, confondu avec ceux contre qui il luttait par la garde tout juste arrivée. Cette histoire est passée sous silence à Askoli avec le reste des récits glaçants des actions commises sur les nordaches en représailles à la Guerre des Marches. Elle mettra des années à en découvrir chacun des détails en questionnant son frère, mais conservera à jamais un souvenir vivace de cette soirée où elle vit tout son monde balayé par la fureur populaire sans qu’aucun de ses proches ou des braves de l’Hukkomelsen ne puisse rien y faire, eux qu’elle imaginait pourtant si puissants. Enfermée au sein de sa communauté pendant l’essentiel des troubles de la guerre de succession, elle avait vu cette nuit ses parents, son frère, ses cousins et tous ceux qu’elle considérait comme ses protecteurs se liquéfier face à la gravité de la situation. Cette stupeur qui semblait saisir tout le monde n’était que l’expression de la sagesse de la communauté du quartier nordique dont le visage changerait en effet pour toujours avec l’exil de l’Hukkomelsen et de la grande majorité des nordaches.

Syrus et Branhilde sont trop vieux pour envisager un voyage vers Medeva sous la protection d’Irene Balling qui se démène pour organiser le départ de chacun. Les Belislet font partie des rares nordiques à rester à la Capitale et ils sont pris pour cibles plus d’une fois. Les malheureux qu’ils hébergeaient sont parmi les derniers à partir, une fuite notamment permise par les entremetteurs de l’Oncle Jori et du vieil Azad de la Source. Les camarades de Bagbo de l’Hukkomelsen qui s’en vont lui recommandent de le suivre sans ses vieux parents, ou à défaut, de tenter de se placer sous la protection du clan qadjaride de la Sublime. Lorsque Horsten s’en va à son tour avec le cousin Felgur et une partie des parents des Belislet, il veut rassurer Askoli et tâche de se montrer plus optimiste : il lui promet qu’avec Bagbo pour veiller sur elle, il ne pourra rien lui arriver, et qu’un jour inévitablement, son frère l’emmenera vivre parmi les mésigues avec le reste des nordaches. La nouvelle paix des bandes est conclue sans l’Hukkomelsen en exil et en quelques semaines, il semble que le Quartier nordique n’a jamais compté que des étrangers.

513 (9 ans)

Syrus et Branhilde font l’objet d’un pillage intensif soutenu par les autorités qui ferment les yeux. Leur domicile a été identifié comme le lieu de résidence de Bagbo par des capitalards membres de diverses brigues opposantes ou tout simplement hostiles aux nordiques. Dépossédés de la plupart de leurs biens, ils sont plongés dans la misère la plus totale au grand désarroi de Bagbo. Ils ne peuvent profiter que d’une maigre solidarité de leur communauté puisque l’essentiel a déserté vers la Medeva où ils ont été accueillis par Nicodème Makkroletis. Askoli, lorsqu’elle vadrouille paisiblement aux abords du quartier qui porte les stigmates des émeutes, chantonne parfois quelques prières qu’elle destine aux déesses dont elle a retenu les noms. Après tout, personne n’en saura rien, et peut-être ces divinités seront-elles plus clémentes, moins cruelles que cet Arbitrio imperturbable, sourd à tous les appels des miséreux et des opprimés du fait de son éternelle retraite.

Un voisin galdyri particulièrement virulent s’installe dans l’islet. Il se plaint d’Okbomeril, il lui reproche sa puanteur et le voit comme un nuisible, il menace de s’en débarrasser et quelques semaines plus tard, Okbomeril disparaît. Les habitants qui viennent remplacer les anciens voisins et amis de la famille ne sont pas des nordaches, ils désapprouvent la plupart de leurs mœurs et les perçoivent comme des nuisibles et des reliques du passé. Il arrive régulièrement qu’un gaillard virulent les interpelle ouvertement pour les encourager à quitter la Sublime et même le Royaume sur le champ pour regagner le “Nord” d’où ils viennent à n’en pas douter. La disparition d’Okbomeril et les soupçons qui se portent naturellement vers le voisin galdyri finissent de convaincre Syrus et Branhilde qu’à défaut de quitter la Sublime ils doivent se résoudre à déménager plus loin.

Yonderick dit la Jonquille, le propriétaire d’une équipe mineure au sein de la brigue des bleus et un vieil ami de la famille, accepte de prendre les Belislet sous son aile. Quarantenaire esseulé, il loue quelques pièces dans le Quartier des Nouveaux Islets et permet que Syrus, Branhilde, Bagbo et Askoli viennent y habiter avec lui. Il doit sa situation légèrement supérieure à la moyenne des nordaches à ses succès passés dans le domaine des paris, en particulier du temps où Syrus combattait encore - un temps qu’Askoli n’a pas connu. Aucun des Belislet ne s’interroge sur les intentions de Yonderick, tous voient en lui un vieil ami de la famille à la générosité sincère. Branhilde et Syrus sont en effet aveuglés par l’amitié qui les lie à la Jonquille, autant que par la situation catastrophique dans laquelle se trouve leur foyer. Bagbo et Askoli, eux, ont trop bénéficié de la bienveillance de la communauté dans leur jeunesse et en ont trop manqué récemment pour voir venir le pot-au-rose. Branhilde tombe malade dans les mois qui suivent, mais tout le monde soupçonne que sa maladie n’est que l’expression de sa souffrance suite au départ de la communauté.

Le talent de Bagbo demeure intact malgré les épreuves de la vie. Accompagné d’Askoli et de Syrus qui surveille de près chacun des faits et gestes de son fils, il se rend sur les petites places des Halles des six cent colonnes, dans le quartier du Vieux marché, et plus largement dans tout le sud, le centre et l’est de la Sublime, et il y fait son petit numéro, près d’un canal, de l’Austre ou d’un puit par sécurité. Avec un camarade volontaire le plus souvent issu de la brigue des bleus, il échangent des coups fictifs et Bagbo abrège l’échange en crachant le feu pour la foule de badauds alors que son adversaire détale comme convenu en poussant des couinements craintifs destinés à provoquer quelques rires. Ils parviennent ainsi à gagner plusieurs dizaines de royes mais Syrus en profite surtout pour encourager Bagbo à développer toutes les qualités qui feraient de lui un gladiateur reconnu. Comme ils ne peuvent plus s’entraîner dans la cour intérieure de leur islet bien aimé, ils le font plutôt à l’arène ou lorsque c’est impossible dans un local des bleus. Syrus n’est plus vraiment en état de rivaliser avec le Fovomastodonte aussi Askoli sert de mannequin pour que son frère s’exerce. Les deux s’accordent souvent pour la pousser à bout et l’endurcir ; il est devenu évident qu’elle suivra la voie de ses aînés.

514 (10 ans)

Pour subvenir aux besoins de sa famille et pour leur épargner d’éventuelles représailles, Bagbo n’opère plus dans son équipe traditionnelle au sein de l’équipe des bleus mais dans celle de Yonderick qui capte l’essentiel de ses gains, où il ne peut jouir que d’un statut bien moindre et où il est réduit à toujours travailler sous des pseudonymes qui ne mettent pas en avant ses origines nordaches comme il le faisait autrefois. Askoli n’a cependant jamais cessé de l’accompagner. Bien que son frère ne soit plus appelé ainsi, elle peut toujours scander avec ferveur lorsqu’il entre dans l’arène : “Bagbo Den-Brojsker Undir-Hukkomelsen Sta-Brig Blar !” ou en capitalin : “Bagbo l’entêté sous l’Hukkomelsen dans la brigue des bleus !” bien qu’elle ne fasse jamais la traduction depuis son dialecte recomposé et approximatif. “Brig Blar ! Brig Blaaaaaaar !” s'époumone-t-elle. Souvent, les représentations des gladiateurs comportent des personnages emblématiques et des scènes historiques. Askoli participe toujours certains soirs : elle incarne la fille du prophète à qui la Nation Adaarionne doit la garde montagnarde dans une représentation qui met en scène le Défi de Svarstak où son frère a le rôle du général et compagnon monachiste Banson. La nordache n’est pas très sensible à l’intérêt historique de ce genre d’exercice, mais les chorégraphies en armes, la réplique du pont de la cité-état en bois, le fracas du fer contre le fer et les exclamations du public finissent de la convaincre de s’accomplir dans cette voie. Comme le Défi comporte la participation de plusieurs chevaux bien qu’elle n’en monte aucun, elle fait la rencontre de Huguérin, un jeune garçon qui travaille à la gestion des bêtes et à l’entretien des écuries sous la houlette de la brigue des bruns.

Le Vieux Gilque se fait voir régulièrement dans le Quartier des Nouveaux Islets et le Quartier nordique. Sans l’Hukkomelsen pour le repousser lui et ses hommes, il peut circuler librement et il ne manque pas de se pavaner à chaque occasion qui se présente. La guilde des Collecteurs a été dissoute lorsque son chef fut assassiné pendant la Nuit Rouge. Le vieil homme est soutenu par quelques-uns de ses anciens acolytes les moins dégourdis et tente de rallier d’anciens membres à sa nouvelle bande avec force peine, adoptant tour à tour les surnoms de “Collecteur en chef” et d’“Archicollecteur”. Ses détracteurs le désignent plutôt sous le sobriquet de l’”Epaviste” en raison de sa sempiternelle obsession à dépouiller les créanciers dont il est responsable du moindre sou. Le jour comme la nuit, ils toquent aux portes et n’hésitent pas à causer des dégâts pour se montrer convaincants. Ils ciblent avec application les derniers nordaches qui sont des proies faciles, sans défense. Jamais ils ne toquent chez Yonderick mais Bagbo et Askoli craignent le jour où ils le feront et s’inquiètent de la présence du Vieux Gilque. Syrus et Branhilde supportent très mal la vie au sein du Quartier des Nouveaux Islets qui borde le quartier Nordique où ils habitaient. Ce dernier a été dévasté par les événements de la guerre de succession qui ont mené à l’exil de l’Hukkomelsen et de la plupart des nordaches. Branhilde meurt, emportée par la maladie et probablement par le désespoir du fait du départ de toute la communauté. Syrus ne sort plus et ne paraît pas surmonter le deuil terrible qu’il doit faire. Le moine Grande Cernes vient à son chevet, il lui parle longuement mais l’endeuillé refuse dorénavant de sortir ou même de communiquer ; il sombre partiellement dans la folie.

515 (11 ans)

Syrus meurt à son tour après avoir dépéri pendant plusieurs mois sans que rien ne puisse le consoler, pas même son admirable fils et sa fille bien-aimée à qui il s’adressait sur ses derniers jours comme à des étrangers. Il semble à Askoli que l’époque bienheureuse de son enfance au sein de la communauté nordache est cette fois définitivement révolue. La procession n’est composée que de quelques personnes puis Syrus est enterré près de Branhilde au Clot d’Arbitrio. La fratrie des Belislet est dévastée, Yonderick leur promet de s’occuper d’eux comme s’ils étaient ses propres enfants. Grandes Cernes approche Bagbo et Askoli et leur propose de devenir serviteurs laïques au sein de sa maison de charité, il se montre dubitatif quant à l’aide que souhaite leur apporter la Jonquille. Il semble que les deux ne s’apprécient pas. Pour les apaiser dans leur souffrance, le vieil ami de leur père les emmène plutôt voir le moine qui s’occupe de son cas. Il s’agit du Vénérable Sesson. Contre toute attente, celui-ci leur conseille de se détourner du gladiatoralisme. Pour Askoli, aucun d’entre eux ne comprend vraiment la douleur qu’elle partage avec son frère. Elle rencontre Unelma, une eyjarska qui se confie occasionnellement au Vénérable Sesson. Ensemble, elles se rendent jusqu’à l’Oratoire impérial pour admirer l’édifice.

Bagbo et Askoli cessent de vivre chez Yonderick. Ce dernier désire retrouver toute son intimité et satisfait des succès de Bagbo, il leur laisse plutôt une chambre unique au sein du modeste local réservé à son équipe de gladiateurs. Elle se trouve dans le quartier des Rues des couleurs près d’un bureau de pari et d’une école d’armes. Les deux derniers Belislet passaient de toute façon déjà le plus clair de leur temps aux alentours de l’arène dans le sud-est de la cité. Vivre seule avec Bagbo est une libération et une épreuve : il ronfle, il fait dormir Askoli dans les parties commune lorsqu’il a de la visite, il laisse les denrées pourrir, son autel de famille prend la poussière, il défonce la porte pour rentrer la nuit, il joue l’apprenti cracheur de feu au sein même de leur chambre. Le relâchement est total comme s’il n’avait jamais eu la moindre once de savoir-vivre et d’éducation de la part de Branhilde et Syrus. Askoli se calque sur le modèle de son frère et elle adopte son mode de vie. Il est drôle et elle ne connaît pas de meilleure compagnie. Le fait qu’il soit peu regardant et peu attentif aux faits et gestes de sa petite sœur est plutôt une qualité dans les yeux d’Askoli. De plus, elle peut l’accompagner librement partout où il va. Elle assiste à ses entraînements, à ses combats de rue, il lui arrive même d’avoir le droit d’être présente pour les réunions de l’équipe de la Jonquille dont elle est devenue la principale supportrice.

516 (12 ans)

Bagbo fréquente un nouvel amant, Odime. C’est un des rares nordaches restés à la Sublime. Il est particulièrement mystique et très cultivé, loin du tempérament bagarreur que partagent Bagbo et Askoli. Si Bagbo l’apprécie d’abord pour son charme d’éphèbe, Askoli s’attache à lui parce qu’il ne manque jamais d’une histoire fascinante à raconter. La jeune nordache découvre les récits mythiques du roi Orvar et de ses fils Yorvick de Krelm et Asbjörn de Baenum Sigur - le même que dans les récits que lui faisait Syrus. Elle se prend de passion pour Osgur et son exode vers les confins du monde jusqu’à la mer de la Raakavan. Odime est de loin celui qui parle le plus du Culte des Sept mers à Askoli. Il l’accompagne elle et son frère jusqu’à la tombe de leurs parents au Clot d’Arbitrio. S’il ne remet pas en cause la religion arbitrée, sa vision du monde est complexe et témoigne de la difficulté des nordaches à se sentir pleinement capitalards ou vaahvas. Askoli regrette de ne pas être née sur la terre de ses ancêtres. Bagbo reste le plus souvent silencieux, en prière, il se tient à l’écart de leurs conversations et Odime et Askoli ne s’interrompent que pour aller le réconforter lorsqu’il ne parvient pas à retenir ses pleurs. Ces récits l'inspirent bien davantage que l’ensemble de la mythologie arbitrée ou des déboires politiques du Royaume Central auquel elle se sent étrangère lorsqu’on lui fait l’éloge des Maahvitts. Elle espère que Bagbo et Odime vont se marier, mais ils ne sont pas de cet avis et Odime prend la direction d’Uuroggia avant la fin de l’année où il s’imagine refaire sa vie comme le devraient selon lui les nordiques arbitrés.

Sans l’Hukkomelsen pour le protéger, Bagbo doit être accompagné de ses camarades de la brigue des bleus lorsqu’il se rend dans les quartiers du port ou dans les Dix milles rues pour mettre en oeuvre ses spectacles de rue. Il s’agit le plus souvent de véritables combats dont l’objectif est de maîtriser l’adversaire au sol, mais il arrive aussi qu’ils opèrent une chorégraphie plus poussée à laquelle sa soeur participe ; ils réalisent quelques acrobaties, Askoli rivalise de cabrioles pour impressionner les passants quand elle ne prend pas les paris. Pour couronner le tout, Bagbo souffle le feu et ses complices miment le fait de fondre sur place comme s’ils faisaient face à une créature fantastique. Lorsqu’ils sont plutôt dans l’ouest de la cité, Bagbo tient à conserver son surnom de Fovomastodonte ; il explique aux autres qu’il a le souffle du désert romentin et ça fait bien rire tout le monde. Ces escapades ne sont pas forcément très lucratives mais elles occupent l’essentiel du temps que Bagbo ne consacre pas à son activité dans l’équipe de la Jonquille ou tout simplement à l’arène. Askoli arpente désormais ses grands couloirs de marbre et de bronze avec une certaine aisance. Les jours de fête sont ceux qu’elle préfère comme lors de la Marche des Grands : les gradins peuvent alors accueillir près d’une centaine de millier de spectateurs, les défilés descendent le long des Halles des six cent colonnes, des acteurs sont payés pour jouer tous les grands noms du Continent, le spectacle est grandiose.

517 (13 ans)

Le moine Grandes Cernes insiste pour voir régulièrement Askoli et Bagbo. Il leur rend visite dans leur chambre dans les Rues aux couleurs et il déplore la mauvaise tenue de leur autel familial en plus du capharnaüm ambiant. Un jour, il vient alors que Bagbo est de sortie avec la brigue. Il aide longuement Askoli à ranger, il passe un coup de balai. Avec un grand naturel mais non sans maladresse, elle lui parle des lohikarmes et des esprits nordiques auxquels il lui arrive de s’adresser ; pour se faire peur plus que par dévotion. Grandes Cernes la réprimande alors Askoli n’évoque pas le fait qu’il lui arrive de chanter pour les Déesses. Il lui fait porter une réminiscence qui doit lui rappeler l’unicité du Créateur. La plupart du temps, Askoli se débarrasse de ce lourd collier sous prétexte qu’il gêne ses mouvements et lui provoque des rougeurs sur la nuque. De toute façon, Grandes Cernes officie dans le quartier des Nouveaux Islets et la petite nordache n’hésite pas à faire l’école buissonnière lorsque Bagbo la prévient qu’il sera de visite dans l’après-midi, par exemple.

Bagbo est employé auprès du clan de La Source pour un spectacle de rue où il met pleinement à profit ses talents de combattant et de cracheur de feu. C’est son amie Daryah, celle-là même qui lui a transmis son savoir il y a quelques années qui le vante auprès du clan lorsque ses membres cherchent un remplaçant à un qadjaride fiévreux. Le clan de la Source comporte plus d’un millier de phral et de phren. La collaboration, la solidarité dont il font preuve ne sont pas sans rappeler à Askoli des souvenirs douloureux de son quartier nordache. Bagbo et les qadjarides répètent leur mise en scène puis, à quelques reprises, ils mettent leur plan en œuvre et rencontrent un franc succès. Le clan ne dévoile pas un dixième des secrets des artifices qu’il emploie à Bagbo quand bien même celui-ci doit mettre son intégrité en péril. En effet, il s’agit pour une bonne part de procédés issus de la sorcellerie qadjaride : révéler leur fonctionnement n’est pas franchement bien vu chez eux à ce qu’on dit. Askoli ne se sent pas personnellement rejetée mais elle ne peut s’empêcher de faire le lien avec ce vanhamaate qu’elle avait vu traiter les nordaches comme de vulgaires sudistes, exactement comme s’ils n’avaient rien en commun. Elle sait que son clan à elle se trouve plutôt en Medeva, où les nordaches demeurent parmi les mésigues et il arrive qu’elle réclame à Bagbo leur départ prochain. Plus âgé, le jeune homme ne veut pas se risquer à un tel voyage en compagnie de sa sœur alors que la guerre d’indépendance mésigue bat son plein. Il sait pertinemment que dans la petite ville nouvellement fondée de Branne, l’avenir qui l’attend n’a rien de comparable avec celui d’un gladiateur prometteur de la Sublime.

Un petit groupe de débardeurs rouges détrousse Bagbo de ses torches, de son huile et même de ses beignets huilés alors qu’il revenait du front de mer. Il imagine demander aux qadjarides de lui prêter main forte. Lorsqu’il en fait la demande auprès de Daryah, celui-ci lui explique d’emblée que le clan ne se mettra pas en danger pour un kharedji et qu’il lui appartient de ne pas se faire dérober son matériel. La Jonquille se montre tout aussi incapable de régler le problème, et Bagbo ne sait plus vers qui se tourner. Askoli demande à Unelma l’eyjarska de l’aide, car elle sait que la Klika est en conflit avec les rouges. Unelma obtient que la Klika règle le problème de Bagbo ; ses membres intimident volontiers les quelques rouges qui lui collent aux basques. Toutefois, ils ne se privent pas d’insulter copieusement le nordache au passage car l’un d’entre eux le reconnaît et se souvient de la correction qu’il avait infligée à un membre de la Klika à la Belle-colline en 511, il se fait même cracher au visage. Unelma s’excuse auprès d’Askoli mais cette dernière ne lui en veut pas, d’ailleurs, Bagbo non plus et tous sont très heureux que cet épisode soit maintenant derrière eux.

518 (14 ans)

Askoli rentre dans sa première équipe au sein de la brigue des bruns en tant qu’apprentie. Il s’agit d’une brigue mineure chargée avant tout d’élever et de dresser les animaux de combat où elle connaît le jeune Huguérin. Elle devra évoluer sans son frère qui demeure dans la brigue des bleus où on ne lui accorde pas sa place. Elle doit se résoudre, sur les conseils de la Jonquille, à utiliser une version capitalinisée de son nom et à réduire sous silence son origine nordique, sans parvenir à vraiment berner qui que ce soit. Askoli ne fait preuve d’aucun intérêt particulier pour les bêtes sinon qu’elle apprécie les voir combattre et leur aspect sauvage qu’elle associe maladroitement à la mythologie des déesses des Sept mers. Elle perd chacun de ses cinq premiers duels sans que cela ne lui coûte sa place du fait du peu d’intérêt que les combats des équipes de la brigue suscitent de toute façon. Lorsqu’elle participe à des combats en équipe ou lorsqu’ils sont chorégraphiés à l’avance, il lui arrive d’obtenir une victoire sans que sa participation ne soit jamais remarquée. Celle-ci est quoiqu’il arrive un phénomène rare du fait de son jeune âge, en dépit de sa poussée de croissance. On lui réserve des rôles secondaires, elle équipe les combattants, et se contente la plupart du temps de s’entraîner.

Bagbo est très fier de sa petite sœur et lorsqu’ils célèbrent ensemble, ils ne peuvent que regretter l’absence de leurs parents et de l’essentiel de leurs proches que le destin leur a arraché avec le départ de la communauté nordache. Yonderick ne voit pas en Askoli une grande combattante pourtant de l’avis de tous la petite se débrouille bien avec une hache ou une masse dans les mains. Le jeune gladiateur nordache est approché par le Clan de la Source qui l’encourage à rejoindre leur brigue, celle des oranges. Son amie Daryah est de bon conseil car elle l’encourage vivement à se débarasser de Yonderick, ce à quoi Bagbo ne peut se résoudre en vertu de la solidarité entre nordaches ; il lui semble aussi qu’il doit l’essentiel de son succès à cette généreuse Jonquille. Talagran, un vieux maître d’arme dionian, ancien esclave affranchi il y a plus de vingt ans qui fréquente l’arène avec autant d’assiduité qu’elle, découvre le caractère atypique de la nordache au détour d’une conversation, près d’une porte de l’amphithéâtre. Amusé par son répondant, il accepte de lui accorder régulièrement quelques heures pour lui enseigner son art en dehors de tout cadre et en profitant des fastueuses infrastructures de l’arène. Askoli découvre bientôt que le vieillard n’est pas le plus zélé des instructeurs notamment car il est atteint de terribles troubles de la mémoire qui en font un être désorienté. Il lui permet toutefois de développer sa technique, en particulier à l’emploi d’un bouclier, une arme défensive à laquelle il excelle en dépit des ans.

519 (15 ans)

Lors d’une soirée avec peu d’affluence et réunissant surtout des amateurs, Askoli remporte sa première victoire en duel à l’arène de la Sublime en tant que Anna Aligarri à qui on oppose un jeune homme de son âge contraint quant à lui de singer un écumeur. Plusieurs duels se déroulent en même temps et réunissent des apprentis. Le jeune homme, un esclave d’origine mésigue, n’apprécie pas de devoir jouer l’ocolidien et manque cruellement d’entraînement. Askoli peut le défaire avec assez de brio pour que Yonderick, qui accompagne Bagbo venu soutenir sa sœur, ne se résigne à lui laisser une place au sein de son équipe de la Jonquille dans la brigue des bleus. La nordache continue de voir Huguérin assidûment, il est devenu un ami proche alors qu’ils étaient au service de la même brigue. Ensemble, ils peuvent parler de tout et n’importe quoi. Huguérin a fait part à Askoli de sa fascination pour les fovomastodontes, il n’en a jamais vu. Lorsqu’elle lui raconte que son père alors gladiateur en aurait vaincu un en 492, il refuse catégoriquement de la croire en prétextant que les fovos sont indomptables. Si elle n’était pas là pour le voir de ses propres yeux, elle n’en demeure pas moins vexée par l’incrédulité de son camarade.

Après seulement trois combats au sein de la même équipe où Bagbo réalise un numéro de cracheur de feu qui fait vibrer dans les gradins les fanatiques de la brigue des bleus, un accident malheureux survient et la gorge, la bouche et bientôt toute une partie du visage de Bagbo sont calcinés par les flammes sous les cris d’horreur de sa soeur et l’étonnement du public qui, pour une bonne part, ne voit là qu’un énième ressort scénaristique superbement réalisé. Certains quitteront d’ailleurs l’arène sans avoir compris que rien de cet incident ne faisait partie de la chorégraphie initiale, bien que des esclaves aient conduit Bagbo à des médicastres complètement dépassés sous leurs yeux ébahis. Askoli en garde une peur irrationnelle du feu qu’elle imagine le plus souvent à tort incontrôlable, et elle a beau veiller son frère et prier pour son Arbeta et son rétablissement, il succombe quelques jours plus tard de ses blessures. Elle prend plusieurs mois avant de remettre un pied dans l’arène ce qui provoque la colère de Yonderick qui vient de perdre le meilleur élément de son équipe. Askoli trouve un semblant de réconfort auprès de Talagran qui se montre plus enclin à partager sa peine. Ils se retrouvent dans le quartier des Rues en couleur et pendant quelques temps, ils se voient sans qu’ils ne s’entraînent. Ce sera grâce à lui, sa sagesse et ses conseils que la nordache parviendra à trouver le courage de reprendre son activité.

La procession qui accompagne Bagbo vers le lieu où il reposera - au Clot d’Arbitrio non loin de ses parents - est composée d’un nombre de personnes nettement supérieur à celui qui accompagnait Syrus ou Branhilde. Grâce à sa popularité toute relative dans la brigue des bleus, deux bonnes dizaines de gladiateurs ou d’amateurs viennent renforcer les rangs de ce qui reste de la famille, c'est-à-dire Askoli. Grandes Cernes et Yonderick se tiennent à ses côtés mais il est évident pour tous que la vie de la jeune nordache vient de prendre une tournure fort tragique. Bien sûr, c’est Grandes Cernes qui est chargé de l’Oppi qui précède la mise en terre. Certains de ses mots ne sont pas tendres envers ceux qui s’adonnent au gladiatoralisme, ce qu’Askoli vit comme une trahison. Elle aurait pu éclater de colère mais ce n’est qu’à travers ses sanglots qu’on l’entend murmurer la formule fatidique en même temps que le reste de l’assistance : ““Bagbo, Que ton âme repose en paix pour toujours, dans la joie, l'amour et le repos.”” Le Vénérable Sesson charge à son tour, peu après la cérémonie. Plus influent que Grandes Cernes car il opère depuis le monastère Apothy-Aymeric, il fait miroiter à Askoli une charité monachiste plus généreuse que celle dont elle est parfois bénéficiaire. Sa condition est la suivante : Askoli doit renoncer à son destin de gladiatrice et devenir servante laïque. Mais Askoli a toujours franchement douté d’être vraiment la bienvenue dans la maison d’Arbitrio. Il est sans aucun doute le Créateur de tout ce qui l’entoure, et pourtant, Askoli le sait, elle en est convaincue, les moines ne lui disent pas tout de ce qu’il y a à savoir sur la chose. Une fois que son deuil religieux est terminé, le moine Grandes Cernes annonce à Askoli qu’il va se retirer vers l’Ermitage de Montarei pour y finir ses jours et prêter un vœu de silence. Dès lors, la nordache ne peut plus compter que sur elle-même, elle renonce à se confier à Grandes Cernes au sujet de ses divagations spirituelles.

Unelma est devenue novice sous la tutelle de son muovaava le Vénérable Sesson. Elle raconte à Askoli l’histoire tragique de son cousin qui a endeuillé la communauté eyjarska de la Belle-colline dans sa jeunesse. Le garçon, jovial et apprécié de tous, se promenait souvent dans les faubourgs nord. Unelma était des enfants qui l’accompagnaient ce jour-là. Il s’était jeté d’une étable sur une motte de foin où un inconscient avait laissé une fourche dressée vers le ciel. Comme il avait échappé à leur vigilance, ses amis ne l’avaient retrouvé gisant là que des heures plus tard à la tombée de la nuit. Ce n’est pas une histoire très réconfortante mais Unelma si elle peut se montrer maladroite reste gentille, bienveillante et désintéressée. Elle permet à Askoli de venir librement au Sovsacker, un établissement eyjarska où elles peuvent s’amuser en sécurité sous une étroite surveillance. L’établissement est réputé - selon Unelma - pour les chants marins du Nord que les habitués entonnent inévitablement au cours de la soirée. Askoli songe parfois à Bagbo qui préférait se tenir loin des eyjarskas ; il aurait pourtant passé du bon temps ici. Peu de temps après, Askoli se fait tatouer l’omoplate gauche.

520 (16 ans)

Pendant quelque temps, Askoli choisit de concourir à l’arène sous le nom de Bagbo. Yonderick finit par le lui interdire sous prétexte qu’elle salit la mémoire de son frère et son honneur en lui faisant porter le poids de ses défaites, en réalité, celui qui se fait appeler la Jonquille voit d’un très mauvais oeil les plaintes du public qui ne comprend pas qu’on lui annonce l’arrivée de Bagbo sans qu’elle ne soit suivie par son numéro de cracheur de feu.. Yonderick lui propose de l’épouser et lorsqu’elle refuse catégoriquement il menace de l’expulser de son équipe dans la brigue des bleus. Sans aller jusque là, comme il bénéficie du soutien lointain d’un des membres urbains de la noblesse qui financent la brigue, il en profite pour le convaincre de ne plus laisser à Askoli que des rôles qui ont en partie vocation à l’humilier même lorsqu’elle ne joue pas dans son équipe. Elle participe donc aux combats sous le nom de “Septentrion la Zarègue” et on lui impose d’affronter le plus souvent trois gladiateurs déguisés en nordiques et supposés représenter les tribus se disputant la colonie de l’Empire Central dans la Zaraga. Si Askoli peut s’illustrer lors des moments les plus chorégraphiés, c’est une représentation historique qu’elle a vocation à toujours perdre et qui lui vaut surtout les railleries du public ; mais parfois aussi une certaine sympathie dont elle s'enorgueillit secrètement. Elle doit se travestir, un exercice auquel elle excelle en se rendant méconnaissable lorsqu’elle incarne par exemple le célèbre général Abessain, un héros de la Campagne de la Zaraga, grimée d’une fausse barbe.

Talagran ne sait pas trouver les mots pour réconforter Askoli aussi il lui propose de se défouler sur sa targe sans qu’il n’ait jamais l’air de faiblir, ce qui a le don de frustrer la jeune nordache encore davantage et de l’épuiser assez pour faire ses nuits d’un trait. En fin d’année, leurs entraînements se font plus sporadiques mais Askoli ne se sépare plus de son bouclier à pointe. La mort de Bagbo restreint de manière drastique le cercle social d’Askoli. Elle ne s’en remettra jamais vraiment et s’enfermera temporairement dans une profonde solitude. Bientôt, elle trouvera plutôt intérêt à parler avec les plus miséreux, les délaissés, ceux que le sort a frappé durement avec qui elle se trouve de nombreux points communs. Plutôt que de s’éterniser à l’arène où la Jonquille lui mène la vie dure, Askoli se rend de plus en plus souvent dans les cercles de combat qui l’entourent où son activité est bien moins encadrée. Sans Bagbo pour l’épauler, elle ne fait pas le poids et pire, il lui arrive de se faire détrousser et malmener même lorsqu’elle remporte une victoire. Le public, quelqu’il soit, n’est jamais aussi enchanté qu’après le numéro de cracheur de feu de son frère défunt. Son maigre pécule et la part qui lui revient grâce à sa participation au sein de l’équipe ne suffisent pas à envisager une émancipation de la jeune femme vis-à-vis du vieillard irrité qui veut maintenant faire d’elle son épouse, sans doute à défaut d’avoir réussi à lui trouver une autre utilité.

Elle rencontre un esclave qui est bientôt revendu pour purger sa peine dans un officine de paris où il doit constamment compter et calculer des changes. Il s’appelle Kasiphoros mais les capitalards l’ont forcé à se faire appeler Casiphore. Lorsqu’il lui raconte la conquête de la Medava par les forces de Fauxvelles, Askoli ne s’étonne même plus de la bestialité des légionnaires capitalins et de leur irrépressible besoin d’asservir des peuplades étrangères. Elle s’inquiète du sort de la communauté nordache, de ses lointains parents, de ses camarades de l’Hukkomelsen. Elle fréquente peu à peu les autres esclaves de l’ergastule et rencontre Rue et Béranger. Les garçons prétendent l’avoir déjà rencontrée, elle et son frère Bagbo alors qu’ils réalisaient leur numéro dans le Cad. Askoli ne les croit d’abord pas, elle ne s’est rendue là-bas qu’occasionnellement. Cependant, lorsque Rue évoque le cracheur de feu, il ne fait plus aucun doute qu’il dit la vérité. Dès qu’elle en a l’occasion, Askoli lui rend visite pour lui tenir compagnie. Elle cède lentement à l’affection qu’elle éprouve pour celui qui n’est après tout qu’un enfant, ce qui causera bientôt sa perte ou tout du moins sa propre mise en esclavage. Elle lui apporte des poucets : des fritures de pain, d’oignon et de jambon. Une fois, elle s’érige en figure parentale pour le garçon, lui prodigue une grande variété de conseils ou de vérités générales confuses. Une autre, elle se montre complice et joueuse, indifférente à son sort et s’adresse à lui sans la bienveillance attendue lorsqu’on parle à un enfant, comme s’il était son égal.

521 (17 ans)

Askoli joue la cheffe de guerre Vaara de Lissenbot dans une représentation d’un des derniers épisodes de l’Unification adaarionne où elle affronte un Banson plébiscité par le public. Le spectacle comporte plusieurs plateformes de bois que les gladiateurs doivent escalader pour réaliser des chutes impressionnantes ; l’un d’entre eux, issu de l’équipe adverse, se tue à la tâche en se réceptionnant sur la nuque mais la nordache - bien que pétrifiée lors de cet épisode - n’est plus tellement sensible à ce genre de pertes et elle s’en remet très vite. Huguérin se confie à Askoli sur son envie d’apprendre le maniement des armes, Askoli lui propose donc naturellement de l’introduire plus longuement à Talagran qu’il a déjà croisé. Ensemble, ils reprennent les bases, ce qui n’est pas pour déplaire à la nordache. Talagran s’amuse à répéter que Huguérin est son élève avant d’être le sien. Elle ne fait pas tant preuve de patience à l’égard de celui-ci, mais elle apprécie chacun des moments qu’ils passent ensemble même lorsque leurs échanges pourraient paraître rudes ou tendus. Elle se sent utile et il arrive que les deux s’exercent en l’absence de Talagran qui n’a jamais brillé par sa régularité. En se rendant à l’ergastule de l’arène pour y retrouver Rue, Askoli fait la rencontre de Horcara, une capitalarde trentenaire d’origine canatanaise ayant servi au sein de la garde honnête puis s’étant rebellée avec les pouillards lors de la guerre de succession en 512. De forte constitution, elle a tenu nombre de barricades sous les ordres de Michelle Bataillis. Elle se trouvait aussi à quelques dizaines de mètres de l’imprimeur pouillard Noirelet lorsqu’il fût arrêté, ce qui mit fin à sa République Capitalarde de Cyvales qui aura duré trois pauvres jours, dont Horcara s’évertue d’ailleurs à démontrer le caractère flamboyant à Askoli qui, elle, ne se montre pas très réceptive bien qu’elle admire sa combativité. Horcara lui présente un plan pour s’évader de l’arène, il fait bien rire la nordache.

Askoli demande à Yonderick de la laisser quitter son équipe “de la Jonquille” au sein de la brigue des bleus. Elle lui annonce son intention de retourner au sein de la brigue des bruns ; avant qu’elle ne puisse le faire, Yonderick qui est bien informé sur les membres de son équipe et les traite avec de moins en moins d’égards réduit cette perspective à néant en dénonçant une liaison fictive entre Askoli et le jeune Huguérin. Ce dernier doit bientôt faire face à de nombreux reproches sur l’ascendant vaahva de sa prétendue partenaire. Sans que cela ne constitue un véritable scandale, c’est assez pour que les membres notables des bruns ne considèrent définitivement Askoli comme une mauvaise influence et qu’ils ne décident de la tenir à l’écart. Finalement, même Huguérin fait savoir qu’il est de cet avis pour préserver sa réputation au sein des bruns : Askoli est une nordache têtue et elle fréquente trop les résidents de l’ergastule de l’arène pour être tout à fait nette.

Fauxvelles est assassiné à son couronnement et en découle une terrible débandade qui agite la Sublime. Les phalangistes sont traqués par une foule dévote et hargneuse et rares sont les quartiers qui sont épargnés par la vindicte populaire. Sans que sa vie ne soit aucunement menacée, la conversion du roi puis les massacres, l’absence de repères stables la laissent désoeuvrée et une nouvelle fois, Askoli prie ses Déesses et Arbitrio indifféremment avec une grande maladresse. Le sujet reste pour elle totalement tabou et elle s’évertue à en faire un secret bien gardé, même pour ceux qui sont ses plus proches amis - elle n’en a de toute façon pas beaucoup. Comme elle a vu d’autres nordaches le faire dans son enfance, elle se fait tatouer un logogramme de Helgi. Du côté des esclaves de l’arène, Horcara a tenté une évasion qui s’est soldée par un échec quand la Sublime était la plus agitée. Elle fait périodiquement l’objet d’une surveillance accrue et pendant un temps les deux femmes ne peuvent pas se voir. Kasiphoros est affranchi et regagne la Medeva, il espère retrouver sa famille à Branne. Askoli hésite à le suivre ; elle ne le fait pas car elle ne le connaît pas suffisamment par rapport aux autres esclaves de l’ergastule et qu’elle n’en a pas encore le courage, cependant son départ l’inspire. Bien qu’elle n’ait pas les royes nécessaires, elle pense de plus en plus souvent à prendre la route, sans savoir vraiment où elle ira. Elle s’imagine attendre que Rue, le jeune garçon pour lequel elle s’est prise d’affection et qu’elle voit toujours régulièrement, soit affranchi avant d’organiser son départ.

522 (18 ans)

Près de dix ans après les émeutes du quartier nordique, Askoli endosse le rôle d’Irène Balling sous les directives de la Jonquille. Le spectacle, lourdement chorégraphié et faisant intervenir de nombreux artifices qui servent à accentuer les souffrances supposées de la cheffe de l’Hukkomelsen en exil, met en scène cette fuite et l’accompagne d’une mort fictive, lente et sanglante qui exalte un public hostile à la plupart des figures nordiques, la Guerre des Marches étant encore fermement ancrée dans les esprits. La nordache est la cible de jets de fruits pourris mais aussi de pierres et autres objets plus sordides, elle est blessée à deux reprises sans que cela ne provoque aucun émoi ; la dure vie de gladiateur est ainsi et a fortiori pour ceux qui ne font pas preuve d’une très grande compétence. Elle conserve sur sa lèvre supérieure une cicatrice en guise de souvenir de l’un de ces dons des spectateurs. En février, Yonderick renouvelle sa demande à Askoli, il souhaite l’épouser et il devient évident que c’est l’unique raison pour laquelle il la tolère encore dans l’équipe dont il est le propriétaire. La Jonquille est peut-être un bon parti pour celle qui ne peut plus compter sur personne, et pourtant, il la répugne et elle ne peut s’accoutumer ni à son âge, ni à sa lâcheté permanente et encore moins à sa façon de tout faire pour qu’on oublie qu’il est issu du quartier nordique. Huguérin cherche à la voir pour lui demander de transmettre une épée : un présent pour Talagran qu’il voudrait remercier. C’est une tâche bien difficile car depuis quelques semaines il est introuvable. Il ne s’est pas présenté aux derniers rendez-vous convenus et l’absence totale de nouvelles de sa part n’est pas rassurante. Vraisemblablement, les errances de son esprit auront causé sa perte.

La nordache se sent acculée, aussi elle retourne au sein du quartier de son enfance en quête d’anciens camarades de son frère prêts à lui prêter main forte pour se sortir d'affaires. Depuis les émeutes de 512, la population nordique a largement été remplacée à tel point que c’est la brigue des rouges qui contrôle maintenant ses rues et qu’on ne le distingue plus vraiment du Quartier des Nouveaux Islets. Après plusieurs tentatives infructueuses, elle finit par tomber nez à nez sur Ronsäg, l’amant de Ufnar lorsqu’ils n’étaient tous que des enfants et des adolescents. Ronsäg, maintenant trentenaire, a lui aussi été membre de l’Hukkomelsen comme Bagbo. Il accepte d’aider la nordache en vertu de la solidarité entre nordiques et du bon vieux temps. Surtout, les motivations d’Ronsäg résident dans le comportement capitalinisé du nordache Yonderick qui se fait appeler la Jonquille. Comme il était coutume de le faire lors des assassinats commis par l’Hukkomelsen, Ronsäg propose de tenter de le tuer en le noyant dans le canal Sybille et en prétextant un accident. En quelques jours, ils sont prêts à passer à l’action. Ils sont dissuadés au dernier moment par une patrouille en barque de la garde urbaine. L’ancien amant de Ufnar s’est fait une belle frayeur, il n’ira pas se risquer à un deuxième essai laissant Askoli à son triste sort, désespérée.

Au mois de mars, Askoli organise un beau matin et sur un coup de tête l’évasion d’une douzaine d’esclaves de l’immense ergastule de l’arène. Elle s’imagine qu’après avoir rendu leur liberté à Horcara la canatanais, au jeune Rue qu’elle affectionne et à son ami Béranger, ils pourront aller n’importe où. Ensemble, ils pourraient emprunter un navire par delà la mer cyvalite et se rendre à Uuroggia pour tenter d’y retrouver Odime. Ils pourraient gagner la Medeva et y chercher parmi les populations asservies par Fauxvelles les restes de la communauté nordache : Horsten, le cousin Felgur et tant d’autres. Ils pourraient arpenter le monde et visiter ses merveilles, du Mont Adaar aux lumières d’Arbitrio dont lui parlait Unelma. Askoli est prise d’un violent vertige ; elle n’a jamais quitté la Sublime que pour se rendre dans ses faubourgs. En ouvrant successivement autant des geôles que le temps le lui permet et en confiant des armes à ceux qu’elle libère, elle tente en vain de déclencher une émeute pour couvrir sa sortie et rencontre très vite la résistance de gardes et des quelques gladiateurs présents. La plupart des esclaves qu’elle affranchit de manière précoce ne la suivent même pas, clairvoyants. Avec un ersatz de plan concocté dans la nuit, elle et ses complices ébahis mais enthousiastes ne parviennent qu’à franchir deux couloirs avant de subir une répression brève et sanglante qui interrompt leur escapade. Horcara est abattue d’un carreau d’arbalète par un garde urbain qui se trouvait en haut de l’escalier qu’ils devaient emprunter. Askoli en tire un profond mépris pour ceux qui emploient cette arme mécanique qui met sur un pied d’égalité les forts et les faibles - du moins c’est là son avis. Tous sont arrêtés après une futile résistance, si vaine qu’elle ne justifie pas d’abattre les rebelles qui comptent d’ailleurs parmi eux un enfant de treize ans.

Askoli ne retrouve Rue le jeune garçon que lorsqu’elle est jugée par l’Ordonnance avec le reste de ceux qu’elle a tenté de libérer. Elle est condamnée à l’esclavage et subit de vastes brimades, le double des coups de fouet infligés aux esclaves de l’arène car il est déterminé lors de son jugement qu’elle a agi de son propre chef et a entraîné les autres avec elle dans sa folie. On lui accroche à la cheville un lourd boulet qui la force à traîner la patte. Askoli formule la demande de voir le Vénérable Sesson mais c’est Unelma qui se présente de l’autre côté des barreaux de la cage dans laquelle la nordache est enfermée. Elle la réconforte autant que faire se peut sans parvenir à comprendre ce qui a motivé son geste et lui souhaite une prompte rédemption. Huguérin quant à lui l’évite soigneusement bien qu’il soit presque constamment du côté de l’arène affairé avec les bêtes de la brigue des bruns. Finalement, elle est revendue à peine quelques jours plus tard dans un lot d’esclaves considérés comme trop turbulents parmi lesquels se trouve le jeune Rue. Askoli est soulagée d’avoir échappé à Yonderick. Au fond d’une nouvelle ergastule vers les quais, elle prie la Déesse Svartjö, qu’elle croit être la divinité vaahva en charge de la réunion avec Arbitrio après la mort, et elle l’implore de faciliter celle-ci pour la courageuse canatanaise Horcara.

Trivia

Reroll de Wajebro et Badrin.

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